Thane Krios : Larmes du crime Abyss 06/07/2021

Thane Krios : Larmes du crime

Les Drells et les Hanaris sont particulièrement discrets au cours de la Trilogie Mass Effect mais leur background n’est pas avare en anecdotes et secrets.

Celui qui donne du relief à ces histoires est un Drell nommé Thane Krios. Son personnage ambivalent et peu loquace a été à la base conçu pour offrir aux joueurs une romance exotique équivalente à celle de Liara pour les Shepard féminines souhaitant se lier à un personnage alien masculin.

Au-delà de la romance, Thane est devenu peu à peu un protagoniste important aux yeux des fans ; non seulement grâce à son design et son attitude mais aussi par son charisme et son histoire personnelle particulièrement touchante. Son état d’esprit et son questionnement intérieur tout au long de Mass Effect en font l’un des personnages qui évolue le plus, même si ces changements interviennent de manière discrète.

De ses débuts à sa mort, attardons-nous ensemble sur l’arc narratif de Thane Krios, ce Drell qui raconte une si belle histoire avec si peu de mots.

Je vous aime. Même alors que les vagues du temps auront égrainé le sable mon souvenir, ce sentiment seul restera.

Thane.

Symbiose et Synacte

Souvenirs d’un autre monde

Thane Krios est un Drell né en 2146, une espèce humanoïde reptilienne qui a connu la destruction de son monde-éden, Rakhana, des suites d’une industrialisation trop précoce, d’une surpopulation massive, de guerres pour le contrôle des ressources et d’un manque d’avancées technologiques qui ont enlisé les siens sur le sol aride et désormais stérile de leur planète.

Leur salut n’est pas venu du trio de divinités drells; Arashu (Déesse de la maternité et de la protection des familles) Amonkira (Dieu des Chasseurs) ou Kalahira (Déesse de la mort et des océans) mais bien d’une autre espèce organique : les Hanaris. Durant 10 ans, 375 000 Drells ont été évacués généreusement par la Primatie Illuminée ; une poussière au regard des 11 milliards qui sont restés prisonniers de leur monde.

La première génération de Drells fit connaissance avec une planète aux antipodes de la chaude Rakhana. Kajhé est en effet un monde océanique pourvu de seulement 10 % de terre, sous la forme de petites iles. Le reste du territoire se trouve sous l’océan et est accessible aux organiques terrestres via des véhicules sous-marins dérivés du M44-Hammerhead. Dans ces bas-fonds gisent d’antiques ruines prothéennes sur les fondations desquelles des Temples ont été érigés en l’honneur des Prothéens, qu’ils nomment « Porte-Flammes » et qui ont appris aux Hanaris à parler par bioluminescence d’après leurs légendes. Qu’auraient pensé les prêtres hanaris s’ils avaient appris que leurs ancêtres étaient dégustés en fritures par les Prothéens, si friands de poissons et fruits de mer !

Fraîchement débarqués et afin de faciliter l’acclimatation de leurs invités, les Hanaris construisirent des Cités-Dômes en surface avec un climat contrôlé et adapté à la biologie drell. Ces adaptation ne suffirent malheureusement pas à éviter l’apparition d’une maladie mortelle causée par le taux d’humidité élevé de Kajhé : le syndrome de Kepral, un dysfonctionnement des protéines de transfert de l’oxygène (l’équivalent de l’hémoglobine humaine) qui mène à une dégradation progressive de la fonction respiratoire des malades. Les sujets atteints de cette affection ont pour recommandations de conserver un minimum d’effort physique et d’éviter la sueur sur le thorax ; raison pour laquelle Thane Krios a la poitrine découverte.

Thane, justement, découvre Kahjé, une génération après le sauvetage de son espèce. Depuis lors, les prêtres hanaris proposent un pacte d’allégeance non obligatoire aux Drells : le Synacte. Le Drell s’engage alors à porter assistance aux Hanaris en surface. En effet, bien qu’aidés par un champs de contre-gravité pour rester debouts sur la terre ferme, les Hanaris n’excellent que dans l’eau et non en dehors. Ce qui peut être perçu comme du servage, une vassalisation, est en réalité un très grand honneur pour les Drells. Le Synacte représente leur gratitude éternelle envers leurs sauveurs. Cet engagement totalement libre et l’oeucuménisme prôné par le gouvernement hanari préserve Kahjé de toutes tensions politiques ou religieuse. Bien que certains Hanaris considèrent les Drells comme des citoyens de seconde zone, ils sont heureusement peu nombreux et leurs idées n’ont pas empêché les Drells de s’intégrer dans tous les niveaux de la société hanari. Ceux qui souhaitent s’y soustraire le font librement et deviennent pour la plupart des aventuriers ou des mercenaires comme Feron.

A l’époque, le sauvetage des Drells et la bienveillance des Hanaris envers leur nouvelle population pesaient désormais lourd dans la balance galactique, à tel point qu’un siège au Conseil de la Citadelle devait leur revenir avant la venue de l’Humanité. Pourtant, les Hanaris étaient loin d’être des saints et destinaient certains Drells assujettis au Synacte à un destin bien moins paisible qu’il n’y paraissait…

L’ombre de la Primatie Illuminée

C’est à l’âge de 6 ans que les parents de Thane concluent le Synacte entre leur fils et les prêtres hanaris.

La version officielle à propos du Synacte porte à croire que les Drells exécutent seulement de simples tâches de la vie quotidienne pour leurs maîtres. Mais les Hanaris ont bien vite compris que le corps drell était capable de prouesses martiales très utiles dans le cadre de la sécurité…et l’assassinat.

Les Hanaris, agiles et rapides sous l’eau, capables de secréter des toxines et dotés d’une poigne puissante (comme peut en témoigner Zaeed Massani dans Mass Effect 2) ne sont capables de soulever que quelques centaines de grammes sur terre. L’aide des Drells dans le cadre de missions à hauts risques ou comme simples serviteurs des familles hanaris s’avère donc particulièrement judicieux. Mais le terrain de prédilection de cette espèce qui voue un culte à la chasse et son dieu Amonkira est bel et bien le combat.

La létalité d’un drell surentrainé s’explique en quatre points :

En premier lieu, ils disposent de la masse musculaire la plus dense de toute la galaxie ; ce qui leur confère une force et souplesse supérieures aux autres espèces, en dehors des Krogans et des Yaghs en ce qui concerne la force brute bien entendu. Ils sont en outre immunisés contre la strangulation du fait de la morphologie très particulière de leur os hyoïde et leur capacité à gonfler leur gorge. Ajoutons à cela la sécrétion d’un poison naturel à la surface de leur peau, capable de conférer des hallucinations en cas de contact prolongé.

Deuxièmement, leur vie symbiotique avec les Hanaris les a doté de grandes capacités d’observations. Ils ont perfectionné leur décryptage du langage corporel (ce qui est très utile pour parler à une méduse lumineuse !) bien que la plupart des Drells soit équipé d’implants oculaires permettant de différencier les variations biolumineuse de leurs hôtes ; facilitant d’autant plus la communication.

Troisièmement, les Drells ont une mémoire parfaite, un ultime héritage de Rakhana, leur monde si aride qui les obligeait à se souvenir précisément de chaque lieu riche en ressources. Une capacité très utile dans le cadre de missions complexes qui nécessitent des repérages et des mémorisations de plans très précis. Ces souvenirs sont profondément ancrées dans la mémoire des Drells et peuvent ressurgir, parfois brutalement, lors de stimulations diverses. La contrepartie de ce talent est que certains Drells sombrent dans leurs souvenirs et n’en émergent jamais.

Enfin, la culture drell dissocie l’esprit du corps. Selon leurs croyances, l’Être est scindé en deux parties : l’âme (ou esprit) et le corps, qui nécessitent d’être en bonne santé pour fonctionner en harmonie et rendre un Drell « entier ». Si le corps est blessé et/ou qu’un traumatisme mental existent, le Drell n’est pas vraiment lui-même.

Dans le cadre de missions d’assassinats, cette dualité corps/esprit se révèle utile afin diminuer la charge émotionnelle et la notion de culpabilité. De cette manière les Drells sont capables d’imputer la faute du meurtre aux commanditaires de leurs missions et non à eux-mêmes car ils considèrent que leur corps est utilisé comme une arme tandis que leur esprit reste pur, puisqu’ils ne souhaitent pas personnellement la mort de leur cible. Par ailleurs, cette séparation permet aux Drells de rester concentrés sur leur contrat sans se laisser distraire par leurs émotions.

Qui est Thane Krios ?

La main d’Amonkira

Après des années d’entrainement auprès des prêtres Hanaris, Thane devient une véritable arme vivante. Son premier meurtre de sang froid a lieu alors qu’il a seulement 12 ans : un enfant quand on connait l’espérance de vie des Drells : 85 ans !

Cet enchainement de combats et de meurtres sera paradoxalement une période paisible car son conditionnement par les Hanaris est parvenu à engourdir sa pensée. Tout est simple : Thane est conditionné pour agir comme une arme. Son corps exécute ce qu’il a appris à la perfection et son esprit se distancie des actes commis pour d’autres.

« C’était comme si mon âme dormait tandis que mon corps allait de l’avant »

Pour autant, le Thane qui exécute froidement ses cibles est-il le vrai Lui ? Ou bien n’est-il que le simulacre d’une personne qui ne vit que pour donner la mort ? Les Hanaris en ont fait un Drell « sur mesure », taillé, sculpté pour le combat mais à quel moment a-t-il vraiment eu la chance de vivre sa vie d’enfant, d’adolescent et de jeune homme ?

Sa rencontre avec Irikah va tout remettre en question.

Au cours d’une mission comme une autre, une jeune Drell s’interpose entre lui et sa cible, un vieux criminel galarien qui tente de se faire oublier. Cette Drell, c’est la jeune Irikah. Ses yeux couleur du couchant et son air de défi vont faire chanceler les certitudes de Thane.

Pour la toute première fois, il n’appuie pas sur la détente. Tout était pourtant parfait, la visée laser alignée entre les deux yeux, la position de tir ajustée au millimètre, la vue entièrement dégagée. Mais le canon est resté muet.

« Elle m’a réveillé »

Plus tard, il se met à récolter des informations et surveille les déplacements de sa nouvelle proie jusqu’au soir où elle est enfin seule. Il pénètre dans la pièce, un petit laboratoire de quartier dans lequel elle élabore un remède contre une maladie rare touchant les Hanaris. Ses travaux ne plaisent pas à tout le monde, certains groupes d’influence préférant que la cure ne voit jamais le jour. C’est ce même soir qu’une bande armée vient intimider de nouveau la jeune scientifique.

Mais Amonkira voulu que Thane soit au bon endroit.

Après avoir terrassé les malfrats, il s’identifie comme l’auteur de la tentative d’assassinat de l’autre jour et demande pardon… mais est-ce à Irikah qu’il s’adresse ou à lui-même ?

« Vous avez dédié votre vie à sauver celle des autres. Maintenant, j’ai besoin que vous me sauviez »

Thane n’est plus « entier ». Son âme lui hurle des paroles qu’il n’a jamais voulu entendre. Il ressent des remords, de la culpabilité.

Son âme s’est réveillée. L’arme s’est enrayée.

Irikah et Kolyat : la bénédiction d’Arashu

Aux côtés d’Irikah, Thane se découvre dans le même temps qu’il apprend à connaitre cette jeune Drell qu’il accompagne en permanence. Il commence à aimer l’homme qu’il devient. Des pensées d’une autre vie s’insinuent en lui et des sentiment naissent peu à peu des deux côtés. Irikah lui pardonne ses actes passés et Thane sent qu’il est temps pour lui de changer de voie. Au cours d’un diner, elle lui demande s’il a un jour eu la liberté de choisir sa propre destinée, sa propre voie.

Encore des questions auxquelles il fallait répondre.

Il reste cependant lié contractuellement aux prêtres hanaris par le Synacte. C’est pour y mettre un terme qu’il se rend dans le temple afin de plaider sa cause. Dans un premier temps, les Hanaris se montrent réticents, prétextant qu’il lui incombe de suivre le chemin que les Porte-Flammes ont tracé pour lui mais Thane fait valoir qu’il n’est écrit nulle part qu’un individu ne puisse pas choisir sa voie. Au contraire, les Porte-Flammes ont offert la parole aux Hanaris pour qu’ils écrivent leur propre histoire. Pourquoi n’en serait-il pas de même pour les Drells ?

« Libérez-moi de mon service ; afin que je puisse être avec Irikah »

Convaincus et, fautes d’arguments, les prêtre le libèrent (ce qui démontre que le Synacte n’est pas une forme d’esclavage) mais le mettent en garde :

« Tout le monde n’est pas destiné au bonheur »

Ces mots restent obscurs pour Thane qui se laisse envahir par des sensations nouvelles et puissantes. Avec Irikah, il fonde une famille et donne vie à Kolyat, son fils.

Pour subvenir aux besoins de sa famille, Thane doit trouver du travail. Il n’a rien à faire valoir auprès de ses employeurs : pas de diplômes, pas de CV alléchant, pas de compétences particulières ; ce qui le cantonne à des travaux plus manuels dans lesquels il se rend compte qu’il n’est pas heureux. Une nuit, il ne trouve pas le repos et…

« Je suis retombé dans la torpeur des combats »

Le Drell assassin n’était pas le véritable Thane mais le simple père de famille non plus. Son esprit ne trouve pas la paix, il ressent l’incertitude qui le tenaille.

Que doit-il faire ? Qui est-il vraiment ? Comment être un bon père, lui qui n’a jamais eu de modèle sur lequel se baser ?

Avec l’accord d’Irikah, il réactive ses contacts et recommence une vie faite de contrats et de cibles à éliminer ; à la seule différence qu’il agit désormais pour son propre compte et non plus pour les Hanaris. Il choisit donc les lieux et les personnes et s’efforce de ne pas s’éloigner de la maison afin d’être présent pour sa famille. Insidieusement néanmoins, il reprend son ancien rythme de travail et ses missions le portent toujours plus loin, toujours plus vite. Amonkira reprend la main sur son instrument.

En 2175, le voila désormais à distance de la maison et ses ennemis faisant partie d’une organisation esclavagiste butarienne connaissent son nom grâce au Courtier de l’Ombre. La mortelle réputation de Thane le précède et ils décident donc de le blesser en attaquant son seul point faible : sa famille. Irikah ressent instinctivement le danger et s’assure de cacher Kolyat avant que ses agresseurs ne déchainent leur fureur sur elle. Ses yeux couleurs du couchant s’éteignent dans des circonstances probablement atroces.

La macabre découverte brise définitivement Thane et aura deux tragiques conséquences :

  • Il va s’éloigner de Kolyat afin de le mettre à l’abris de ses ennemis. Ce faisant, le fossé entre le père et le fils ne cessera de se creuser.
  • Il se vengera sauvagement des bourreaux de son épouse en leur octroyant une mort douloureuse. Son enquête lui fait remonter le réseau butarien jusqu’à l’humain engagé pour assassiner Irikah : son nom est Stiv Kay. Son âme est désormais souillée car il a souhaité leur mort, qui plus est, de manière diamétralement opposée aux tirs chirurgicaux et à sa « propreté » habituelle. Thane n’est plus une arme : il est devenu un tueur.

La cérémonie mortuaire en l’honneur d’Irikah se déroule sur Kajhé et conformément à la tradition drell, son corps est immergé dans les flots pour être emporté par Kalahira, déesse des océans et des défunts. Selon les croyances de Thane, son corps est mort mais son âme est vivante et l’attend de l’autre côté du rivage.

Sur la rive des vivants, Krios attend de la rejoindre. Son âme est anesthésiée de chagrin et son corps quant à lui se détériore à son insu, infiltré progressivement par la maladie de Kepral. Pour un Drell, rien ne pourrait être pire.

« Mon corps avait accepté le trépas. Mon âme était morte depuis longtemps. »

 

Le Pardon

Les années passent. Nous sommes en 2185. Le dossier Thane Krios est épinglé par l’Homme Trouble sur le datapad du Commandant Shepard.

A cette époque, la maladie a progressé dans les poumons et d’autres organes vitaux. Il ne reste à Thane que 42% de sa fonction respiratoire, les antibiotiques ne font plus aucun effet, la thérapie génique ne fonctionne toujours pas et il a refusé la greffe de poumons synthétiques proposée par les Hanaris. Il ne souhaite en réalité qu’une seule chose : la mort.

« Son souvenir me possédait »

C’est pourquoi il accepte une dernière mission sur Illium. Sa cible est Nassana Dantius, une influente Asari, lourdement protégée par une armada de mercenaires d’Eclipse et placée en sécurité dans sa haute tour. Il prépare le terrain depuis deux ans. Kalahira se saisira-t-elle de Thane, cette fois ? La mission est périlleuse, même pour un professionnel comme Krios. Si le but officiel est de remplir le contrat, le Drell espère secrètement être emporté au combat plutôt que de continuer à vivre dans ses souvenirs.

Mais voila que Shepard est sur ses traces et s’approche de la cible, sa cible plus vite que lui-même. La course-poursuite ravive les tambours d’Amonkira dans le cœur de Thane. Le Chasseur sort lentement de sa profonde léthargie. Après l’exécution rapide de Nassana, Thane s’engage auprès de Shepard pour une mission qualifiée de suicidaire : sauver la galaxie contre les Récolteurs.

Qu’a-t-il à perdre ? Il ne lui reste rien d’autre que sa solitude depuis de longues années et il est, quoi qu’il arrive, voué à mourir dans peu de temps. Dépourvu d’avenir, il passe le plus clair son temps à revivre ses souvenirs auprès de sa femme et de son petit garçon.

« N’est-il pas préférable de se perdre dans ses souvenirs que de passer la nuit seul à contempler des murs de métal et de plastique ? »

Son sursis lui donne tout de même le temps d’aller sauver son fils, Kolyat. Ce dernier, qui n’a jamais compris la véritable raison des absences de son père, en particulier lors du meurtre de sa mère, suit les traces de Thane et devient tueur à gages sur la Citadelle. Elias Kelham l’a engagé pour tuer son opposant politique turien : Joram Talid.

Shepard et Thane interviennent et l’empêchent de commettre son forfait ; ce qui laisse à Thane le temps de tout expliquer à son fils et de lui éviter la prison grâce au soutien du Commandant.

« Tu es ma seule bonne contribution »

Cette phrase est lourde de sens. Elle implique que Thane n’approuve toujours pas ses actes au cours de sa vie antérieure et ne parvient pas à se les pardonner. Elle redonne également à Kolyat sa place de fils, elle dévoile toute l’importance, l’affection que Thane n’a jamais réussi a lui témoigner quand il était enfant.

Cette phrase est celle du pardon, le premier d’une longue série pour que Thane puisse enfin trouver la paix.

L’appel de Kalahira

Cette paix, il la trouve partiellement sur la Citadelle après avoir sauvé la galaxie de la menace des Récolteurs.

L’Hopital de Huerta lui offre le confort nécessaire aux derniers mois de sa vie. Son introspection est presque achevée et il est heureux d’avoir renoué des liens forts avec son fils. Si les blessures de son âme cicatrisent peu à peu, celles de son corps ne cessent de grandir. Respirer au repos lui devient compliqué, ses doigts s’engourdissent et son cerveau manque parfois d’oxygène. Même si Shepard lui demande, il lui est impossible de rejoindre le Normandy car il a besoin de soins médicaux journaliers.

Son affaiblissement ne l’empêche pourtant pas d’intervenir courageusement lorsque Kai Leng tente d’assassiner le Conseiller Galarien. Contre toute attente, il pousse son adversaire à fuir en dépit de la profonde entaille qu’il lui assène.

Le Conseiller est sauvé. Thane est perdu.

Son déficit en protéines de transfert et la perte massive de sang,  consécutivement à son dernier combat, viennent de signer sa perte.

La barque est prête à partir sur l’autre rivage. Kalahira lui tend maintenant la main.

Avant de partir, Thane récite une dernière prière, accompagné par Kolyat. La première qui ne soit pas pour lui mais pour les autres, si Shepard décide de prier avec eux. Dans l’autre cas, Kolyat, qui fréquente désormais les prêtres drells, récitera une prière plus commune et adressée à l’âme de son défunt père.

La boucle est bouclée. Il a trouvé la paix en devenant celui qu’il a toujours voulu être : un Drell « entier » et vivant, entouré des gens qu’il aime et qui l’aiment en retour plutôt qu’une âme solitaire vouée à l’assassinat.

Un sauveur entouré d’amis plutôt qu’un tueur.

Celui qui s’interpose entre le chasseur et la proie.

Tout comme l’avait fait Irikah.

Tout comme ce geste qui l’a bouleversé à jamais et qui au dernier moment… lui a sauvé la vie.

« Et mène le aux rivages lointains de l’Esprit Infini. »

Siah : le fantôme d’Irikah

La romance de FemShep et Thane est un cas particulier qu’il convient d’aborder car le Drell ne se livre entièrement qu’à travers elle. Derrière la façade de ses mots et ses gestes se cache une peur profonde de mourir sans avoir eu l’occasion de se réunifier avec lui-même, d’obtenir sa rédemption morale et spirituelle. C’est ce qu’il déclare en tapant du poing sur la table tandis qu’il se dévoile à Shepard.

Par ailleurs, il s’agit du seul personnage à romancer qui hésite à entamer une relation avec celle qu’il appelle désormais « Siah », du nom d’une guerrière angélique servant la déesse Arashu. La raison est évidente lorsque l’on connait son statut de veuf… et que le syndrome de Kepral ne leur laisserait que peu de temps.

Cependant, Siah est attirante pour Thane car elle dégage l’aura guerrière qui fait écho à son propre passé. Comme lui, elle est morte et vivante à nouveau ; bien que la mort de Thane soit spirituelle. Comme Irikah, elle le fait « revivre » à travers cette relation. Comme Irikah, elle défend ceux qui sont en danger. Pour Thane, l’histoire se répète, il a une seconde chance.

Sur le plan sentimental, il s’agit d’une des romances les plus pures puisque Thane est condamné. Il n’a donc pas besoin de jouer un quelconque jeu de séduction : il est enfin lui-même car la romance permet d’explorer les sentiments les plus profonds du personnage. Ce n’est qu’à cette condition que Thane avoue ne pas être parfaitement en paix et craindre la mort qui se profile.

A sa mort, si Thane est romancé, c’est l’une des seules fois où l’on verra Shepard pleurer pour quelqu’un et ce, sur l’ensemble de la trilogie.

« Et elle sera ta compagne; comme elle fut la mienne »

 

Conclusion  – « Tu’fira »

Thane Krios est un personnage formidable et absolument hors du commun. Sa vie est marquée par une recherche permanente de son identité profonde qu’il ne parvient pas à trouver à cause du façonnage mental que les Hanaris lui ont imposé.

C’est par le biais d’Irikah et, plus tard, Shepard qu’il se reconstruira tout en effaçant les anciennes blessures qui l’empêchaient de tourner la page.

Sa mort sur la Citadelle, en tant que sauveur du Conseiller est similaire au geste protecteur posé par son épouse Irikah quelques années plus tôt et c’est symboliquement sur ce dernier acte de bravoure qu’il part la rejoindre sur l’autre rivage. Le sauvetage du Conseiller provoquera une prise de conscience de la part des Galariens qui promettent d’entamer des recherches sur une thérapie génique concernant le syndrome de Kepral.

Au terme de son histoire et au regard des émotions qu’il a suscité, il devient pour ses compagnons, son fils et pour nous, les fans, « Tu’fira », un mot drell qui signifie « être perdu en quelqu’un d’autre, être incapable d’oublier son souvenir ».

« Je n’avais jamais parlé de ma femme depuis…jamais à vrai dire. Il ne restait personne à qui en parler. »