Intelligences Artificielles : de Mass Effect à la réalité Abyss 18/05/2023

Intelligences Artificielles : de Mass Effect à la réalité

L’Intelligence Artificielle rentre petit à petit dans nos vies, dans nos mœurs.

Dans une société de plus en plus connectée, où les informations circulent vite, trop vite, où l’anonymat devient de plus en plus rare et dans laquelle les temps de latence humains et la vitesse de traitement des données sont devenus incompatibles avec l’efficacité attendue par l’époque, l’IA semble être devenue le remède à tous les maux. D’abord réservée aux salles sombre des laboratoires des plus grandes entreprises de ce monde, elle s’immisce désormais partout ; jusque dans nos smartphones, pourtant voués à disparaitre selon Mr Chaudry, 22 ans d’ancienneté chez Apple et désormais à la tête de la société Humane, dont le projet est de créer ce qui ressemble à un véritable petit omnitech.

La technologie du futur ne tiendra pas dans votre main, et ne se portera pas sur la tête, elle pourrait même être totalement invisible.

Mr Chaundry, Humane

Plus un jour ne passe sans qu’un nouvel outil boosté à l’IA ne se dévoile, sans que nos machines apprennent à nous connaitre parfois mieux que nous-mêmes. Dans ce contexte, l’actualité de 2023 n’a jamais autant fait écho à Mass Effect, son univers, sa technologie, sa complexité…et ses dangers. Ces merveilles du futur qui avaient l’air inaccessibles hier, tout là-haut sur la Citadelle feront plus que jamais partie de nos vies, ici et maintenant.

Dans cet article Hors-Série, nous vous proposons un petit récapitulatif de l’actualité liée à l’Intelligence Artificielle et son lien très étroit avec ce que nous avons connu sur notre jeu vidéo préféré.

Intelligences Artificielles, de Mass Effect à la réalité

Il s’agit de la technologie la plus profonde sur laquelle nous travaillons aujourd’hui. Qu’elle aide les médecins à diagnostiquer des maladies plus tôt ou qu’elle autorise les personnes à avoir accès à l’information dans leur propre langue, l’IA aide les gens, les entreprises et les communautés à débloquer leur potentiel

Sundar Pinchai, PDG de Google

Bien avant le fracas médiatique causé par l’apparition de ChatGPT auprès du grand public, Google Brain fusionnait en 2014 avec Deepmind, l’équipe à la base de la création du programme Alphago, devenant depuis ce jour une nouvelle entité dénommée Google Deepmind. Le but de cette alliance était de créer un chatbot capable de répondre de manière fluide, structurée, rationnelle, personnalisée et sécuritaire aux requêtes des utilisateurs. En somme, transformer une simple recherche sur le net en une réelle discussion avec la machine.

Pour ce faire, l’outil qui se ferait appeler Bard en 2023, allait bénéficier d’un modèle linguistique LaMDA (Langage Model for Dialog Applications) lui conférant de solides bases quant à la formulation de réponses similaires à celles d’un humain. Durant la phase de « Fine Tuning » (comprenez « optimisation finale »), Google permit à Bard d’apprendre en toute autonomie, en réalisant ses propres recherches sur le net afin d’améliorer sa compréhension du monde et donc d’affiner les réponses produites. Là où d’autres chatbot répondaient auparavant par « Je ne sais pas » dès lors que la question sortait de leur domaine de compétence, Bard cherchait et trouvait des réponses. Ce procédé était désormais possible grâce à la maitrise de l’Intelligence Artificielle.

Nous avons démontré que le fine-tuning associé à des données écrites et autoriser le model à consulter des sources de connaissances externes peut aboutir à une amélioration significative au niveau des deux objectifs-clés que sont la sécurité et l’information factuelle.

Sundar Pichai, PDG de Google 

La puissance de calcul nécessaire à Bard pour fonctionner de la sorte fut réduite par 2 tous les 16 mois et ce, des années 2012 aux années 2020, amenant peu à peu le chatbot au niveau technologique actuel. Mieux encore, la version délivrée de nos jours par Google n’est en réalité qu’un Bard allégé afin que tous les ordinateurs du monde entier puissent l’utiliser, laissant suggérer un potentiel bien plus grand encore.

Cependant, malgré tous les efforts de la firme aux anneaux pour percer dans ce domaine, c’est son concurrent Microsoft, allié à Open AI depuis 2019 qui ouvrit la boite de Pandore de l’Intelligence artificielle en dévoilant ChatGPT, plus tard associé au moteur de recherche Bing dans le but avoué de reprendre le leadership à Google et sa barre de recherche monopolisant la plupart des interactions du net. ChatGPT repose sur un modèle de langage GPT (Generative Pre-trained Transformer), différent du LaMDA de Google, mais ayant lui aussi bénéficié d’un entrainement linguistique avant de lui permettre d’apprendre par lui-même en recherchant sur le net et en interagissant avec les utilisateurs. En somme il s’agit de la même technologie, interprétée différemment, et sortie quelques mois plus tôt, trop tôt au gout du géant Google.

Depuis lors, la course au développement n’a de cesse de défrayer la chronique avec des noms tels que Bard (Google), ChatGPT (Microsoft), Copilot (assistant Open Office), Ernie Bot (Agent de Baidu, le google chinois), BlenderBot (Meta) et tant d’autres moins connus mais qui pourtant ne manquent de nous faire penser aux Avina, Mira, Glyphe, Vigil et Vendetta de Mass Effect. En effet, les « agents conversationnels » de ces grandes entreprises semblent briser la frontière entre la réalité et la Science-Fiction portée par la licence phare de Bioware.

Se pourrait-il que les chatbot boostés à l’IA deviennent les intelligences virtuelles de demain ?

Tout porte à croire que oui ; au vu des fonctionnalités étendues de cette technologie depuis le début de l’année 2023. De simples agents, les chatbots sont en passe de devenir de véritables assistants multifonctions ; en partie à cause de – ou grâce à – la guerre que se livrent les grands noms de la tech. Ainsi, à la manière d’un Glyphe qui assiste le Courtier de l’Ombre dans ses tâches administratives, d’une Avina qui délivre des informations personnalisées aux visiteurs de la Citadelle ou encore de Mira qui supervise la sécurité du complexe scientifique du Pic numéro 15 sur Noveria, nos agents conversationnels vont prendre une place de plus en plus importante dans nos outils du quotidien.

Définitions d’une IA et d’une IV dans le premier Mass Effect :

Dans cette optique, Open AI vient tout juste de franchir un cap important avec GPT-4, une nouvelle mouture de son agent conversationnel qui intègre un modèle multimodal baptisé quant à lui Kosmos-1. Cet étrange jargon signifie que ChatGPT sera désormais capable d’interpréter, répondre et générer du contenu sous forme de textes (chat, écrire un mail pour l’utilisateur), d’images (génération d’images selon requête textuelle, via Dall-E), de sons et vidéos (similaire à Make-A-video, de Meta).

Une véritable révolution.

En réponse à GPT-4, Google annonce, en Mai 2023, PaLM2 (Pathway Language Model). Un tout nouveau modèle de langage succédant à LaMDA. PaLM2 est techniquement plus performant en termes de raisonnement logique, traductions multiples et mathématiques. Le modèle multimodal de Google soutenant l’évolution de Bard est connu en interne sous le nom de code « Project Gemini ». D’après les spécialistes, Gemini serait bien plus puissant que Kosmos-1 (le model de Microsoft), promettant même un nouvel horizon d’application dans le domaine médical, ni plus ni moins. La version « soignante », MED-PaLM2 serait capable d’analyser des radiographies médicales avec une précision proche des professionnels de la santé ! Une évolution telle que celle-ci laisse entrevoir un énorme potentiel qui pourrait déboucher à terme et avec l’aide de la robotique aux lits médicaux automatisés et autres tables d’opérations, aux IV médicales et scanners biométriques… comme dans Mass Effect.

Alors, Bioware, un studio visionnaire ou simple hasard ?

Nous penchons bien entendu pour la première hypothèse tant les similitudes avec l’univers Mass Effect sont nombreuses. Le coude à coude entre les plus grandes entreprises technologiques de notre époque nous ramène à la première décennie des années 2000, lorsque Bioware nous racontait déjà les opaques manigances des groupuscules gouvernementaux (Alliance, Quariens, etc.) ou privés (Cerberus, Synthetic Insights, etc.)  dans leur lutte acharnée pour la (re)conquête de l’Intelligence Artificielle. Les Projets Gemini, Kosmos-1 ou peu importe leur nom ressemblent furieusement à leurs homologues imaginaires comme Hannibal, l’IA rebelle de Séléné ou encore le tristement célèbre Projet Suprématie de Cerberus. Et la comparaison ne s’arrête pas là car les ingénieurs en charge de ces projets n’hésitent pas à déclarer que le modèle multimodal actuel sera le début du chemin qui mène à l’IA générale, fonctionnant comme un cerveau humain. IDA, SAM et Légion verront-ils enfin le jour au sein de notre civilisation ?

Et tous les cas, la grossesse semble bien avoir démarré. Microsoft a par ailleurs été l’un des pionniers dans la construction d’un datacenter composé de milliers d’accélérateurs GPU de la marque Nvidia. L’association, en dizaine de milliards de dollars, de ces deux titans a permis l’exploitation du modèle multimodal d’Open AI (ChatGPT) dans le cadre de leur projet « Azure ». Même s’il ne fait bien sûr pas référence à l’anatomie asari, Azure, ce réseau de machines virtuelles à GPU optimisé, est ce qui se rapproche le plus d’une bluebox quantique dédiée aux IA du monde de Mass Effect.

« L’Age de l’IA a commencé », nous dit Bill Gates. Et malgré les peurs qu’elle suscite, ce dernier reste persuadé qu’elle représente un bon technologique majeur capable de résoudre des questions qui nous dépassent encore à l’heure actuelle. Des problèmes sérieux tels que la pauvreté, la faim dans le monde, l’accès aux soins médicaux, le climat…

Cela changera la façon dont les personnes travaillent, apprennent, voyagent, sont soignées et communiquent les unes avec les autres. Toutes les industries vont se réorienter autour d’elle (l’IA). Les entreprises se distingueront selon leur manière de l’utiliser

Bill Gates.

Cependant, contrastant avec l’enthousiasme des uns, d’autres n’hésitent pas à exprimer leur peur quant aux possibles dérives que l’IA permettra. Depuis la mise en service d’IA avec modèle multimodal, les possibilités d’assistances sont infinies. A tel point que Google a récemment annoncé son Universal Translator, un outil intelligent capable de traduire en direct mais aussi…de restituer la phrase traduite dans la langue de l’utilisateur en créant une voix artificielle qui ressemble à celle de l’orateur/oratrice, intonations comprises et synchronisation labiale (dans le cas d’une vidéo) offerte en prime. Une fonction qui ne peut que nous remémorer les traducteurs universels présents dans les Omnitechs de nos chers amis de la Voie Lactée. Mais, dans le monde réel, à défaut de se demander si Universal Translator pourra traduire de l’Elcor, les préoccupations s’orientent plus vers la création de fake news de plus en plus probable et crédible grâce à des tels outils.

Je suis particulièrement inquiet que ces modèles puissent être utilisés pour une désinformation à grande échelle.

Sam Altman, PDG d’Open Ai

L’autre grande question réside bien sûr dans la possibilité de perte de contrôle de cette technologie et du caractère éthique que la création d’une vie artificielle représenterait. Et même si certains grands noms désirent freiner le développement de l’IA, tel Elon Musk qui propose une pause de 6 mois ou encore, Sam Altman le PDG d’Open AI, Geoffrey Hinton – ingénieur sénior et considéré comme le papa du réseau neuronal et le deeplearning de chez Google ou Blake Lemoine – renvoyé car il avait dit dans la presse que l’IA de Google développait une conscience, le progrès autour des IA ne semble pas vouloir s’arrêter en si bon chemin.

En effet, la route est encore longue jusqu’à la naissance de l’Intelligence Artificielle Générale : celle qui sera capable de tout faire, tout dire, tout apprendre, tout comprendre. Bill Gates en personne, rappelle au grand public que les IA actuelles ne peuvent qu’apprendre par elles-mêmes dans le domaine de compétence qui leur est propre. Point d’IDA ou de Geth à l’horizon donc. Google a par ailleurs fait part de ses Principes Généraux quant à l’utilisation de l’IA afin d’en réguler le développement et, surtout, maintenir le contrôle. Mais les fantasmes les plus fous sont désormais possibles depuis que Bard, dans sa mouture PaLM2 peut corriger et même rédiger des lignes de codes. Parviendra-t-il, un jour, à créer et modifier sa propre programmation ? Aurons-nous, nous aussi, un jour des « pro-IA » qui préfèreront le mot « synthétique » à « artificiel » car irrespectueux/offensant ? Aurons-nous des factions anti-IA qui pirateront les synthétiques et les pourchasseront aux quatre coins de la planète ? Est-ce qu’une IA se cache déjà sous l’apparence anodine d’un simple agent conversationnel comme ont pu le faire IDA sur le Normandy ou SAM sur l’Hypérion ?

En attendant ce jour, l’Internet s’amuse, se fait peur, rêve en publiant ça et là des discussions avec leur agent conversationnel préféré, en activant le mode «célébrité » de ChatGPT pour qu’il parle comme un personnage connu (qui a dit IV du Commandant Shepard ? ), en tentant d’abaisser les barrières comportementales des IA et en s’imaginant ce futur qu’il n’aurait jamais cru pouvoir vivre.

Pour nous, fans de Mass Effect, cet article ne peut que nous faire davantage comprendre pourquoi cette licence nous parle tant, apprécier d’autant plus l’univers dépeint par Bioware. Il n’existe aucune autre œuvre de Science-Fiction aussi tangible, aussi plausible et aussi fidèle à notre monde d’aujourd’hui. Et ce n’est pas le fruit du hasard, ce n’est pas non plus le fruit d’une vision mystique : c’est le fruit d’un long travail préparatoire, de longues recherches, d’écriture, de questionnement, de remise en question.

C’est le rêve de quelques personnes, en 2007. Le rêve d’un monde dans lequel nous pourrions tous vivre un jour. Le rêve de quelques personnes, aujourd’hui partagé par des milliers, des millions.

Mass Effect.