Fan-fiction : « Mass Effect – Réalité » par Mirlina Contributeur MEU 03/10/2013

Fan-fiction : « Mass Effect – Réalité » par Mirlina

C’est une nouvelle rubrique que nous inaugurons aujourd’hui grâce à Mirlina (habituellement vidéaste attitré de MEU). En effet, depuis plusieurs mois, nous avions offert la possibilité aux écrivains en herbe de voir leur fan-fiction publiée sur le site et ainsi profiter d’une mise en avant accrue. Si à votre tour, vous souhaitez voir votre fan-fiction publiée, consultez les conditions de participation sur le sujet créé à cet effet. N’hésitez pas à livrer votre ressentiment à l’égard de cette création. Sur ce, nous vous souhaitons une agréable lecture !


Mass Effect – Réalité

Synopsis :

Un geste courageux, un ultime sacrifice, qui restera gravé dans les mémoires, figé à jamais dans l’histoire par cet instant dont l’éclat vert traverse la galaxie. Du moins, c’était ainsi que l’on pouvait imaginer les choses. Mais ce que l’histoire retiendra, c’est le cadeau fait à la galaxie par une antique race de machine nommée les Moissonneurs. Un recul net et important des maladies et de la mortalité, des avancées considérables dans de nombreux domaines et une paix à l’échelle de la galaxie, une coexistence libre et pacifique.

En bref, un monde parfait, ou peu sans faut. Et pour le nom de Shepard… Mais alors, que penser de cette vague de folie ? Est-ce là le signe d’un nouveau mal, d’une maladie qui aurait résisté et qui menacerait désormais la galaxie toute entière ? Ou la folie n’est-elle que la résultante de quelque chose d’autre ? De bien pire ? Et si les choses n’étaient pas ce qu’elles paraissaient ? 

La douleur traversait son corps par vague, mais elle demeurait faible comparée à son anxiété face à ce rayon dont l’éclat faisait luire l’espace proche et l’éblouissait. Elle s’avançait vers lui d’une démarche hasardeuse, sa vision brouillée par les larmes. Ses jambes étaient de coton mais elle tentait de l’oublier tout comme la douleur qui la tiraillait et poignardait son coeur. Elle aurait voulu avoir plus de temps, mais elle savait que c’était trop tard et ses pensées se tournèrent vers celle qu’elle aimait, qui détenait la clé de son coeur. Elle s’arrêta sur le rebord et prit une profonde inspiration. Elle resta là durant un instant qui lui parut une éternité, hésitante. Elle peinait à mettre des mots sur ce qu’elle ressentait. Elle avait peur, elle était anxieuse, triste… Mais elle ressentait également une forme de soulagement, d’accomplissement… D’achèvement. Et après une dernière pensée, un dernier battement de coeur, une dernière larme… Elle se laissa tomber dans le vide et le rayon l’engloutit pour devenir sa réalité.

L’expansion du rayon, d’abord limitée au Creuset, s’étendit à l’espace proche en quelques secondes. L’énergie se déploya et frappa toute objet ou créature à sa portée, les absorbant pour passer aux suivants. Les Moissonneurs furent les premiers à être prit dans cet éclat et pour eux le temps sembla se figer comme ils restèrent immobile. Les combats faisaient toujours rage sur Terre, d’une violence sans pareille. Les armées étaient lancées dans une lutte à mort et sans pitié, où tous les coups étaient permis, où toutes les horreurs possibles et imaginables étaient réalité. La peur n’avait pas disparu, mais elle avait été remplacée par un instinct de survie, par un désir de vivre au moins une journée encore, d’avoir l’espoir d’en finir. Et quand le rayon submergea la planète, quand il balaya les armée et mit un terme aux combats, alors tous les êtres, organiques comme synthétiques, libres ou non, tournèrent leur regard vers le ciel et observèrent avec un silence admiratif.

L’énergie poursuivit sa course folle à travers la galaxie, passant de système en système grâce au réseau de relais qui se disloquèrent sous la surcharge. L’onde se propagea de planètes en planètes où les mêmes événements se répétèrent les uns après les autres : Les Moissonneurs cessèrent le combat, marquèrent un instant d’hésitation puis s’élevèrent dans les cieux pour se placer en orbite, mettant un terme temporaire ou définitif à la moisson. L’énergie irradia chaque être, s’insinua en eux et traversa chaque fibre, chaque tissu, chaque muscles, chaque fil, chaque composant. Elle remonta dans le cortex, pénétra dans leur cerveau, s’infiltra dans l’ADN et les modifia de façon durable. Chaque être, organique comme synthétique, animal comme végétal fut balayé par cette vague verte, tout comme la galaxie qui se retrouva changée à jamais par ce simple instant, par cette seconde qui sembla s’étendre et durer une éternité.

De nombreuses heures s’écoulèrent dans un silence lourd et apaisant à la fois. Et les Moissonneurs demeurèrent en orbite durant tout ce temps. Ils patientèrent, analysèrent, tentèrent de comprendre puis intégrèrent ce qu’il venait de se produire, ce que cela changeait pour la galaxie, pour les organiques, pour eux. Un mot s’éleva en vibrant à travers leur carapace de métal : Libre. Et finalement, ils prirent contact, dans un esprit de paix.

La reconstruction s’entama alors dans une entente mutuelle, dans une euphorie palpable. La guerre était à peine achevée mais c’était presque comme si elle n’avait jamais existé en dehors des champs des ruines. Chacun s’affairait à rebâtir et tâchait d’oublier ces heures sombres dans un esprit de pardon et un désir d’aller de l’avant. La présence des anciennes machines comme de leurs créations ne créaient pas de trouble, ou du moins, très peu. Et les quelques rares dissidents comprirent la nécessité d’oublier les différents qui les avaient opposé aux Moissonneurs afin d’avancer. En peu de temps, ils furent acceptés comme faisant partie du paysage et de la communauté galactique. Comme s’ils avaient toujours été là. L’aide des Moissonneurs accéléra les processus de reconstruction, permit de remettre en état les relais ainsi que la Citadelle et d’améliorer les bases de données grâce à des savoirs perdus ou oubliés.

De nombreuses avancées technologiques considérable virent le jour dans de multiples domaines allant de la terraformation, qui permit la conquête de nouveaux mondes en modifiant durablement les conditions de vie sur ces derniers, aux énergies vertes qui réduisirent de manière significative la pollution, en passant par le secteur médical. La mortalité recula ainsi que la famine et les maladies qui furent rapidement en passe de disparaître, améliorant les conditions de vies, offrant force, longévité et prospérité. Les synthétiques purent enfin dépasser leur condition d’IA pour devenir des êtres pleinement conscient et vivant.

L’étincelle de la vie brilla en leur sein comme leur corps était modifié et leur ouvrit des nouveaux horizons de possibilités, de sensations et d’émotions. Les Geths comprirent le sens de l’individualité et de la promiscuité sans pour autant renoncer ou bouleverser leurs méthodes anciennes. L’amour entre Joker et IDA pouvait désormais pleinement s’épanouir, sans danger ni incompréhension, au milieu de sentiments véritables et réciproque qui laissaient poindre la beauté d’un amour naissant.
La galaxie toute entière se développa dans la confiance, la sérénité et la tolérance. La société galactique jouissait d’une période de paix telle qu’elle n’en avait jamais connue, bien loin des raids d’esclavagistes, des pilleurs de marchandises, des guerres de territoires et des meurtres et vols en tout genre.

La jeune femme battit des paupières, comme les dernières images se brouillaient pour se dissiper. L’avenir qui s’offrait à la galaxie était plus beau que tout ce dont elle aurait pu rêver. Et alors que sa peau tombait en lambeaux et se détachait de son corps, que son essence se diluait dans le rayon, elle sentit que son choix était bon. Elle avait décidé de croire et d’offrir plus qu’un espoir à la galaxie mais une réalité où tout le monde aurait sa place. Ses dernières pensées furent pour son amour, la personne qui avait partagé sa vie et son coeur. Elle lui demanda muettement pardon de ne pouvoir vivre dans cette avenir avec elle, de ne pouvoir partager cette paix.

– Je t’aime… (Murmura Shepard.) Ne l’oublie jamais.
Une vague de douleur traversa son corps et elle se cambra dans un gémissement plaintif. Le processus s’acheva avec la dispersion totale de son elle physique et l’essence même de son être fusionna avec le rayon et se mêla à toute la vie en s’éparpillant à travers la galaxie, réinscrivant durablement l’ADN de milliards d’êtres…
Et quelque part, à des années lumière de là, sur une planète eden, quelqu’un leva les yeux vers le ciel. Au fond de son âme, cette personne perçut des vibrations, une présence, des mots…
– Oh, Shepard… (Laissa-t-elle échapper dans un souffle, les larmes aux yeux.)
Car elle savait qu’elle ne la reverrait jamais.

L’éclat vert était passé, la galaxie avait changé. Le major Coats arrêta un instant d’écrire son rapport et regarda ses compatriotes oeuvrer main dans la main avec les Moissonneurs pour reconstruire les cités détruites, non sans une certaine fierté. Maintenant qu’il y repensait, il trouvait les derniers mois tellement stupides. La peur des siens ainsi que leur scepticisme, leur suspicion, avait faillit causer de grands ravages. Finalement, les Moissonneurs étaient là pour les aider et cette ère nouvelle était une très bonne chose. Qui aurait pu dire le contraire ? Les circuits électriques qui apparaissaient et luisaient à intervalles réguliers sous la peau de ses congénères pouvait être repoussant au premier abord. Mais les avantages contraient aisément cette laideur visuelle qui n’en était pas toujours une. Il retourna à son rapport quand une Asari se posta devant lui, au garde à vous. Coats la dévisagea et elle lui tendit un papier. L’humain le prit et le parcourut des yeux avec peu d’intérêt. Ses yeux s’arrêtèrent sur un nom, Shepard. Il haussa un sourcil interrogateur.

– Shepard ? (Demanda-t-il.) Qui est-ce ?
– Aucune idée. Mais une femme là bas jure qu’elle a travaillé avec elle.
– Il y a eu beaucoup de perte. Je ferais des recherches.
– Elle jure que cette personne a sauvé la galaxie.
– Sauver la galaxie ? (Répéta l’humain, perplexe.)
L’Asari opina.
– Emmenez moi la voir.
– Oh, et on a aussi trouvé ça sur elle.
Elle lui tendit une plaque provenant manifestement d’un monument aux morts avec inscrit l’épitaphe suivant : Commandant Shepard.
– D’autres personnes corroborent son histoire ?
– Non. Ses anciens compagnons disent qu’après la vague verte, elle a commencée à devenir folle.
Coats opina et la suivit parmi les dédales en ruines. Mais quand ils arrivèrent sur place, ils trouvèrent la jeune femme morte, ses yeux exorbités de terreur et de douleur.
– Qu’est-ce qui s’est passé ?! (Hurla Coats en jurant.)
– On ne sait pas ! (Déclara l’un des garde.) Elle est tombée d’un coup en convulsant. On a rien pu faire, Monsieur.
Le major dévisagea la femme, le visage torturé par son expression.
– Vous la connaissiez ?
Coats ne répondit pas de suite, hésitant. Ses pensées étaient comme troublée, impossible à discerner, à comprendre. Il fixait la jeune femme avec insistance, des alarmes hurlant dans sa mémoire. Il plissa les yeux et lutta contre le brouillard qui obscurcissait ses pensées. Un bref instant fugace lui revint, un visage, une poignée de main… Puis plus rien, seulement un sentiment de perte, mais également de bien être qu’il ne parvint pas à expliquer.
– Non. (Déclara-t-il.) Je suis simplement triste qu’elle soit morte. Affaire classée.
Et il tourna les talons.

Les années passèrent et cette nouvelle vie poursuivit son cours, sans ombre au tableau… Du moins c’était ainsi que les gens voyaient les choses.
Juan Sanchez poussa un petit soupir en parcourant le rapport des yeux.

– Perte de mémoire, agression, folie, peur, aliénation… (Lut-il à haute voix.) Encore un…
– Hin hin. (Marmonna son collègue sans lever les yeux de son datapad.)
– Et il était sur le point de monter une secte manifestement…
– ça lui faisait une activité. (Répondit l’autre, sans le regarder.)
Juan le dévisagea d’un air inquisiteur.
– Et là, trois petits cochons sont arrivés et le loup les a suivit et a soufflé la maison.
– Super.
– Je le savais, tu m’écoutes même pas.
– J’ai un rapport à finir Juan. (Déclara l’homme d’un ton las.)
– Tu n’es sur aucune enquête.
– Pas plus que toi.
– Et ça, c’est quoi ? (S’enquit l’agent en montrant son dossier.)
– Rien du tout. (Répliqua son collègue avant de retourner à son datapad.)

Juan secoua la tête d’un air las. Il examina le rapport durant quelques minutes avant de le poser sur le tas des affaires résolues, comme on lui avait ordonné de faire il y a de nombreux mois. Mais pourquoi ? C’était une question qui lui trottait dans la tête depuis bien longtemps. Bien sûr, il n’était pas chargé d’enquêter sur des affaires de folies. Ce genre de cas relevait d’une pathologie qui concernait les services sanitaires et médicaux et non pas ceux d’un agent du gouvernement terrien. Mais alors, pourquoi les rapports arrivaient-ils systématiquement sur son bureau ? Et pourquoi le nombre de cas augmentait avec le temps ?
Juan fit la moue et resta figé durant de longues secondes, ses yeux fixés sur le rapport. Finalement, il se leva, le plaça dans sa sacoche et quitta le bureau.

– Tu vas où ? (S’enquit son collègue.)
– Enquêter.
– Tu enquêtes sur rien du tout maintenant ?
– Alors disons que je vais prendre l’air.
L’homme poussa un soupir en secouant la tête.
– Fait comme tu veux. (Lâcha-t-il.)
Juan inclina la tête.
– Trop aimable. (Répliqua-t-il d’un ton un peu trop sec à son goût.)

Mais son collègue semblait avoir oublié son existence, aussi s’en alla-t-il. Pour débuter son investigation, Juan décida de faire un tour aux archives. Il fouilla parmi les nombreuses piles de dossiers non traités et classés sans suite à la recherche des anciennes affaires qu’il avait eu entre les mains et de celles qui avaient dû être posées ici par ses collègues suivant les mêmes directives que lui. Le nombre impressionnant de dossier lui fit tourner la tête et l’horrifia. Ses pensées commencèrent à se détourner de l’affaire et il ressentit une profonde lassitude ainsi qu’une envie de tout laisser tomber, de repartir. Mais il se ressaisit et poussa ses investigations jusqu’à tomber sur les rapports qui l’intéressaient.

– Liara T’Soni. (Lut-il sur le premier dossier.)

Il y était décrit les derniers instants de la jeune femme, de son parcours vers la folie. Une photo de la plaque qu’elle tenait à la main se trouvait au milieu du rapport et Juan la prit pour la mettre dans la poche intérieure de sa veste. Il poursuivit sa lecture et releva le nom de la personne ayant signé le rapport : Major Coats. Il ouvrit les autres dossiers.

– James Vega. Steve Cortez. Ashley Williams. Tali’Zorah nar Raya. Javik. Jeff ‘Joker’ Moreau. Garrus Vakarian. IDA. Karin Chakwas…

La liste continuait encore. Juan nota les noms sur son datapad et fit des recherches sur extra-net. Il ne trouvait qu’un seul point commun entre eux en dehors de cette folie : Le Normandy SR2. Le nom du capitaine du vaisseau avait disparut et les rapports à son sujet ou à propos de la frégate étaient très peu nombreux. Il trouva de maigres informations dans de vieux dossiers classés secret, perdu au fond d’une corbeille numérique protégée. Mais les données n’avaient que peu d’importances et Juan poursuivit sa fouille des rapports.

– Steven Hackett. Miranda Lawson. Jacob Taylor…

Ses yeux se posèrent sur un nom qui retint toute son attention.

– Major Coats.

Juan retourna au premier dossier, celui sur Liara T’Soni, et vérifia le nom en bas de page. Il fronça les sourcils, intrigué. Il éplucha d’autres dossiers, releva d’autres noms qui ne lui disaient absolument rien eux non plus. Pourtant, une part de lui avait l’impression de les avoir déjà entendu, mais il ne parvenait pas à se souvenir. Certains rapports étaient complétés de dossier de presse, d’articles n’ayant jamais vu le jour suite à la mort de leurs auteurs. De nombreuses lettres, manuscrite ou numérique relayaient les mêmes informations.
« Shepard, Shepard, Shepard, Shepard, Shepard, Shepard… » sur des dizaines de pages. D’autres parlaient d’une guerre. Juan prit les rapports dans sa sacoche et quitta les archives pour rejoindre une navette en partance pour la Citadelle. Une fois installé dans son siège, il feuilleta d’autres documents, de plus en plus préoccupé, des rides d’inquiétudes se dessinant sur son visage et faisant plier ses circuits électriques qui le faisaient alors souffrir. Dans ses fouilles, il tomba sur un article d’un dénommé Matt Hicks.

« La découverte d’un corps hier au soir dans la ville de Buenos Aires plonge la planète dans l’effroi et rappelle avec force les autres morts similaires découvertes au fil des mois. Tout le monde se souvient de l’arrivée quelques années auparavant des Moissonneurs qui nous apportèrent savoir et illumination. Leur cadeau le plus important, celui qui bouleversa à jamais notre vie fut la synthèse. Avec elle arriva la fin des maladies grâces aux systèmes immunitaires renforcés, la perfection génétique et physique qui a détruit la plupart des inégalités. Cette perfection s’est accompagnée d’une brusque prise de conscience à l’échelle galactique et nous a rendu meilleur sur de nombreux points. Fini les guerres. Les conflits se sont arrêtés en quelques semaines. Mais depuis lors, des morts inexpliquées surviennent et se multiplient. La question que nous sommes en droit de nous poser est la suivante :

Savons-nous toute la vérité ? Peut-être une nouvelle forme de virus, bien plus dangereux que tous les autres, court-il dans nos rues. Nous pouvons facilement trouver des liens entre les victimes. Chacune d’entre elle a servi dans l’Alliance à bord d’un vaisseau nommé le Normandy SR2, ou a côtoyé l’un de ses membres d’équipage suffisamment longtemps. Allons-nous faire face à une épidémie ? Le plus troublant est que ce vaisseau n’existe pas officiellement. Les rares informations à son sujet sont.. »

L’article se terminait ainsi, de manière assez brutale. Mais Juan découvrit un autre écrit du même auteur, visiblement plus personnel.

 » Jour 1.
Je me sens bizarre aujourd’hui. Au réveil, j’ai cru voir quelque chose, dans ma chambre. Mais ça a disparut en quelques secondes.

Jour 2.
Shepard… Shepard… Ce nom ne cesse de me hanter depuis que j’ai débuté mon article… Mais pourquoi j’ai la sensation qu’il ne m’est pas inconnu ?

Jour 3.
J’entends des voix… Mais qu’est-ce qui m’arrive ? Qu’est-ce que je peux faire ? J’ai pensé aller consulter, mais je ne veux pas que l’on me traite de fou, pas maintenant, pas à l’approche d’une si grande découverte !

Jour 7.
J’ai des passages à vides. Je vois… Je vois des choses qui sont en total désaccord avec ce qui est…

Jour 10.
ça ne s’arrête pas, au contraire ! Je n’arrive plus à différencier les choses, je n’arrive plus à penser… Les voix murmurent dans ma tête… J’ai peur…

Jour 14.
Je vois Shepard. Je la vois ! Je vois ce que le Normandy a accompli… ça y est, je me souviens ! Comment ai-je pu oublier ? Ils essaient de me dissuader. J’ai l’impression… Que ce n’est pas normal, que je suis une anomalie… Ils ne m’auront pas ! Je leur résisterais !

Jour 17.
Ce sont des mensonges ! Que des mensonges ! Je dévoilerai la vérité, je la dévoilerai ! Ce n’est pas un virus, je ne suis pas une anomalie ! Je résiste… »

C’était la dernière entrée. Juan demeura pensif un long moment, de plus en plus perplexe et inquiet. La navette était arrivée à la Citadelle et les passagers descendirent, mais l’agent resta assis, comme déconnecté de la réalité. Après de longues minutes, une main se posa sur son épaule mais il n’eut pas la moindre réaction. Alors on le secoua et il tourna la tête.

– Hein ?
– Nous sommes arrivé, Monsieur.
– Oh… (Fit-il en prenant conscience de ce que lui disait la jeune femme.) Oui, pardon. J’étais dans mes pensées.
– Ce n’est pas grave. Il n’est pas rare que les passagers s’endorment durant le trajet. (Dit-elle avec un sourire chaleureux.)
– Mais je ne dormais pas.
– Je crois que si, Monsieur.
– Non.
– Oh. Et bien, j’ai dû mal voir.
– Oui, certainement. (Lâcha-t-il d’un ton hautain avant de quitter l’appareil.)

Juan rejoignit le SSC après une bonne nuit de sommeil. Elle avait été agitée par des rêves étranges, probablement dû à son enquête. Étrangement, il avait à de nombreuses reprises sentit l’envie d’abandonner, de rentrer chez lui, comme si une force voulait le dissuader de continuer. Mais il avait décidé de l’ignorer.

– Bonjour. Agent Juan Sanchez, chargé d’une enquête pour le compte du gouvernement Terrien.
– Que puis-je pour vous ? (S’enquit le Turien de l’accueil avec un sourire.)
– J’ai besoin d’accéder aux affaires classées.
– Quelle section ?
– Folie.
– Vous avez une autorisation ?
L’humain sortit les dossiers de sa sacoche.
– Oui.
Le Turien les regarda d’un air sceptique.
– Qu’est-ce que c’est ? (Demanda-t-il, perplexe.)
– Ce sur quoi porte mon enquête.
Le Turien dévisagea l’humain durant un long moment.
– Section folie, vous dites ?
Juan opina.
– Faites voir votre autorisation.
– La voilà mon autorisation. (Déclara l’humain en montrant les rapports.) Je suis chargé de l’enquête et en vertu de l’article 272 A, paragraphe 7, vous êtes tenu de m’accorder assistance et accès à vos ressources dans le cadre du partage intergalactique.
L’agent du SSC demeura interdit un court instant.
– Mais..
– Il n’y a pas de mais, agent. Donnez-moi accès à vos ressources. (Trancha l’humain avant de rajouter.) S’il vous plait.
– Plus personne ne mène d’enquête depuis la synthèse, agent. (Répliqua le Turien.) Pardonnez mon insistance.
– Ce n’est rien.
– Cela vous dérange si je contacte vos supérieurs ? (Demanda le Turien en scrutant son interlocuteur.)
Celui-ci se figea une demi seconde mais son visage demeura neutre. Il pria pour que l’agent du SSC n’ait rien remarqué et hocha la tête.
– Faites donc si le coeur vous en dit. Mais je suis assez pressé. Puis-je accéder aux archives pendant que vous les contactez ?
Le Turien plissa les yeux et dévisagea l’humain avec insistance, manifestement troublé. Puis, il finit par acquiescer et quitta son comptoir.
– Suivez moi.

Juan avait fouillé durant des heures et avait trouvé de nombreux rapports, beaucoup trop nombreux, qui faisaient état de disparitions inexpliquées, de folies et de mort. L’un d’eux était consacré à un Moissonneur mais comme les autres, l’affaire avait été classée sans suite et jamais divulguée. Face aux visites répétées et aux questions insistantes et dérangeantes du Turien qui semblait pressé de se débarrasser de lui, il quitta les locaux, non sans copier le maximum de données. Mais le comportement de l’agent du SSC continuait de le titiller. Celui-ci n’avait pas appelé ses supérieurs, ce qui arrangeait Juan, mais il n’avait eu de cesse de le surveiller, de le questionner et même d’essayer de le dissuader de poursuivre. L’homme tourna dans la rue de son hôtel et il se sentit soudainement anormalement fatigué.

Il tituba et se rattrapa au mur pour ne pas chuter. Une violente migraine explosa dans son crâne. Le monde autour de lui vibra et ses yeux virent floue durant une seconde. Quand sa vue redevint normale, il remarqua une jeune femme qui passait près de lui. Elle avait les cheveux roux et portait une veste avec le signe du N7 sur la poitrine. Elle n’était pas sans rappeler quelqu’un à l’agent mais son nom lui échappait et son visage commençait déjà à devenir trouble, tout comme sa vision. Il secoua la tête pour se remettre les idées en place. Sa vision redevint nette et il chercha la femme du regard. Mais elle avait disparue.

– Étrange…

Son enquête l’amena à visiter de nombreux mondes, tel Thessia, Palaven ou encore Tuchanka, à braver quelques interdits en posant des questions gênantes et à s’attirer chaque fois plus de regards inquisiteurs. Plus son enquête avançait et plus il avait de questions et plus il se sentait épié, surveillé. Les Moissonneurs étaient peut-être ceux qui étaient le moins curieux de ces intentions, mais également ceux qui en disaient le moins, comme s’ils dissimulaient de lourds secrets. Pourtant, ils ne semblaient pas avoir de mauvaises intentions ni vouloir lui mentir. C’était comme s’ils se cachaient des choses à eux même.
Les nuits de Juan étaient désormais toutes agitées ou peu s’en faut. Cela faisait maintenant neuf jours qu’il enquêtait et voyageait, et il entendait désormais des murmures pour le moins déplaisant. Les symptômes décrits dans le journal de Matt Hicks ressemblaient à ce qu’il vivait, à ceci près qu’il n’avait pas de vision, du moins, pas à sa connaissance. La seule chose étrange qui lui arrivait parfois était de voir cette femme aux cheveux roux.

Il traversa la rue pour se rendre au poste de Surkesh quand une créature au corps fripé et aux yeux sombres et vitreux lui bondit dessus. Des os perçaient sa peau et ses griffes étaient anormalement grandes, difformes. Elle cracha, tenta de lui lacérer le visage et Juan poussa un hurlement. Le monstre essaya ensuite de le mordre quand il parvint à lui bloquer les bras. Il recula pour essayer de lui échapper et chuta au milieu de la route. La créature rugit et lui sauta dessus et il ferma les yeux, se protégeant de ses bras.

– Mais qu’est-ce qui lui arrive ? (Fit une vois sur sa droite.)
– Tout va bien, Monsieur ? (Demanda une autre devant lui.)
– Il est malade… (Murmura quelqu’un dans son dos.)
– Faites attention, c’est dangereux !

Il rouvrit les yeux, le corps secoué de tremblements de peur, de la sueur roulant sur son front. Tous les regards étaient tournés vers lui et l’incompréhension se lisait sur les visages. Mais du monstre, il n’y avait nulle trace. Juan déglutit, apeuré et resta sans bouger encore quelques secondes, reprenant doucement pied dans la réalité, acceptant que ce qu’il avait vu n’était qu’une hallucination. Il attrapa une main tendue et on l’aida à se relever.

Juan passa les jours suivants enfermé dans sa chambre d’hôtel, à éviter tout contact avec le monde extérieur. Il connaissait le journal de Matt, savait qu’il souffrait du même mal que lui. Et leur seul point commun était la recherche de la vérité au sujet de Shepard. Il savait donc qu’il ne lui restait que peu de temps et que la meilleure façon de survivre était de découvrir le fin mot de toute l’histoire. Il passa du temps à tenter de maîtriser ses visions et d’en déchiffrer le sens. Paradoxalement, au fur et à mesure qu’il prenait conscience des choses, qu’il s’approchait du noeud du mystère, les voix s’amenuisaient, du moins celles qui voulaient le dissuader de continuer.

Elles étaient désormais complètement muette, mais il lui arrivait de percevoir le mot anomalie, comme un malaise, une sensation d’oppression qui s’insinuait en lui. La jeune femme rousse lui était encore apparue plusieurs fois, mais jamais seule. D’autres personnes l’accompagnaient régulièrement et l’agent les reconnaissait pour avoir vu leur photo dans leur dossier. Il s’agissait des membres d’équipages du Normandy. Dans ces recherches, il avait trouvé deux informations importantes. La première, c’était que Urdnot Wrex avait succombé au même mal qu’aux autres, laissant Tuchanka dans une situation précaire (et la mort d’un Krogan par folie était quelque chose de suffisamment important pour être signalé) et deuxièmement, que le SR2 avait été mystérieusement détruit après la mort d’IDA et de Jeff Moreau, comme si quelqu’un cherchait à faire disparaître toutes les traces.

En plus des visions de Shepard et ses compagnons, Juan voyait des paysages sombres quand il regardait par la fenêtre. Les rues n’étaient pas calme et tranquille, ne luisait pas sous les rayons du soleil, mais étaient au contraire recouverte de sang et de cadavres de divers espèces, sombres et ternes. Il ferma les yeux et inspira profondément pour appeler une autre vision. Parfois, il y parvenait, même si le processus qui les enclenchaient demeurait mystérieux. Un tremblement secoua son corps, un frémissement. Et quand il rouvrit les yeux, Shepard était devant lui, dans son armure.

Elle se trouvait dans une pièce, face à des écrans d’ordinateurs et à un immense soleil qui brillait à travers une baie vitrée. Des vaisseaux passaient régulièrement derrière cette vitre et des explosions suivaient. Une image se matérialisa face à la jeune femme, dans des tons verts et un être de race inconnue à Juan apparut. Il disposait de quatre yeux et parlait d’une voix neutre aux intonations robotiques, le classant certainement dans la catégorie des IV.

– Vous essayez de me libérer des forces endoctrinés ? (S’enquit l’IV.)
– Oui. Je dois savoir ce qu’est le catalyseur.
– Les protocoles de sécurité ont été contournés. J’obéis. Le catalyseur améliore les transmissions d’énergie noire et coordonne tout le réseau des relais cosmodésique. Dans votre cycle, on l’appelle la Citadelle…
– Quoi ?
– Le catalyseur est la Citadelle.
– Donc, le Creuset et la Citadelle ensemble peuvent arrêter les Moissonneurs ?
– C’est exact.
La vision se dissipa, laissant le jeune homme groggy. Il mit un instant avant de retrouver ses repères, de reprendre pied dans la réalité.
– Le Creuset… Le catalyseur… (Murmura-t-il.)
Quand il se releva enfin, il avait un nouveau but : La Citadelle.

La réalité et le rêve s’emboîtait l’un dans l’autre. Juan avait de plus en plus de mal à discerner ce qu’il vivait réellement des souvenirs d’une autre personne qui l’assaillaient. Il se rendit en tâtonnant dans tous les sites de la Citadelle susceptible d’abriter les réponses à ses questions, hurlant qu’il voulait se rendre au catalyseur sous peine de tout divulguer. La folie commençait à s’emparer de lui, et il sentait qu’il dérivait. Un oeil voyait le rêve et l’autre la réalité, une vision de cauchemar et une autre plus douce, presque féerique, presque belle, presque sans défaut. Etrangement, la Citadelle semblait déserte, dans une forme comme dans l’autre. Et au milieu d’une coursive s’activa une plateforme qui l’amena sur l’un des versants extérieur. Face à lui se tenait un Moissonneur qui le regardait de ses photorécepteurs écarlate. L’agent s’avança vers lui en titubant, perdant peu à peu le contrôle moteur de son corps.

– Je sais des choses… (Lui dit-il tout bas.) Je sais des choses… Je me souviens de choses ! De la guerre que vous nous avez amené…
L’Augure ne dit rien et se contenta de le regarder, patient.
– J’ai vu Shepard… Je l’ai vu ! Qu’est-ce que vous avez fait ? Qu’est-ce que vous avez fait ?!
– Nous avons changé la galaxie. (Déclara l’entité de sa voix forte.)
– Vous nous avez trahit ! Tout n’est que mensonges !
– La synthèse a amené la paix et nous nous assurons qu’elle perdure.
– Qui êtes-vous ? (S’enquit l’humain, perdu.)
– Autrefois, on me connut sous le nom du catalyseur. Aujourd’hui, je ne suis plus qu’un observateur silencieux.
– Mais vous êtes un Moissonneur…
– Oui et non. J’ai téléchargé ma conscience dans cette machine pour me préserver de la destruction à la fin de la guerre.
– Pourquoi personne ne se souvient de cette guerre ? (Demanda l’homme d’une voix tremblante.)
– Car elle est un obstacle à la paix.
– Et Shepard ?
– Aussi. Cette femme fut le symbole d’un combat. Elle a livré bataille et apporté la paix. Mais son souvenir demeurait un danger, une source de conflit.
– Avec quoi ?
– Avec la synthèse.
– Pourquoi ?
– Parce que ce fut son essence qui servit à alimenter ce changement. Le simple fait de prononcer son nom éveille des échos de ce qu’elle fut au fond des gens. Et ces échos créent des perturbations qui désynchronisent la synthèse.
– C’est pour cela que les gens deviennent fous ? (Demanda l’homme, de plus en plus diminué, apeuré, perdu.)
– En partie seulement. Les gens deviennent fous pour que le secret demeure, pour enterrer ce qui ne devrait plus être.
Juan recula d’un pas, le dégoût déformant son visage.
– C’est vous cette folie ?
– En partie.
– Pourquoi ? (S’écria l’humain dans un brusque excès de colère.)
– Pour maintenir la paix.
– Une paix bâtie sur un mensonge !
– Oui.
– Mais ça ne marche pas…
– Non. La synthèse est la forme ultime de l’évolution et cette solution est parfaite. Malheureusement, certains la rejettent, et ce faisant, ils contaminent les autres.
– Combien sont déjà morts ?
– Plus que vous ne pouvez l’imaginer. Mais il n’est pas possible de revenir en arrière. Il n’y a pas d’autre alternative.
– Et combien ? Combien devront mourir encore ?!
– Autant qu’il le faudra pour que subsiste la paix.
– Vous êtes un monstre… (Lâcha Juan d’une voix tremblante, les larmes aux yeux.)
– Non. Mais je ne vous en veux pas de le croire. Je ne fais que ce qui est nécessaire, peu importe le coût. L’essentiel est la sauvegarde de la vie.
– Vous mentez, vous mentez ! (Hurla Juan, ses yeux injectés de sang ne reflétant plus que la folie.)
Il se trouvait au milieu d’une allée marchande, en plein coeur de la Citadelle. Il se tournait vers chaque personne à sa portée, gesticulant et hurlant.
– Vous êtes un monstre ! Vous mentez ! C’est un mensonge ! Combien devront mourir ?!
Des tremblements secouaient son corps et se faisaient plus violents au fil des minutes. Les gens reculèrent, apeurés, mais il n’essaya pas une fois de les toucher, comme s’il ne les voyait pas. Il hurlait et bougeait dans tous les sens, comme un drogué en manque. Ses jambes cédèrent et il tomba au sol, haletant.
– Vous mentez… (Murmura-t-il.) Shepard… Shepard… Elle a… Elle a…
L’un de ses yeux voyait désormais les passants et l’autre était encore fixé sur le catalyseur qui penchait ses photorécepteurs sur lui, brillant d’une lueur amusée et malsaine.
– Shepard a choisit. Si vous devez blâmer quelqu’un, blâmez la elle.
– Elle a… Elle voulait… Nous sauver…
– Et je ne fais que poursuivre cette voie, Juan Sanchez
– Combien d’autres… Combien d’autres… (Lâcha-t-il tout bas, d’une voix presque éteinte et tremblante.)
– Autant qu’il le faudra. (Répéta l’entité.) Le rejet sera totalement éliminé.

L’apparition disparut et Juan reprit pied dans la réalité. Il n’y avait que les passants qui formaient un cercle autour de lui et le dévisageaient avec horreur, crainte et dégoût. Au milieu d’un tremblement, il se questionna sur ce qu’il avait vu, ce qu’il avait vécu… Mais son esprit était brisé, son corps à bout de force. Ses muscles se détendirent comme la vie le quittait.


Premier Epilogue

Nhilsa, une Turienne du SSC, fraîchement débarquée sur Terre, se rendit dans les bureaux de feu Juan Sanchez. Son enquête lui avait déjà fait visiter les autres mondes sur lequel l’humain s’était rendu mais elle n’y avait trouvé que peu d’éléments intéressant. Les maigres informations qu’elle avait pu récolter de ci de là, les quelques témoignages éparses recueillies, présentaient l’intéressé comme un fou victime de névrose. D’après ce qu’elle savait, il n’avait plus rien mangé une semaine avant sa mort et avait arrêté de s’hydrater trois jours avant.
Quand elle pénétra dans les bureaux du gouvernement terrien et que tous les regards se portèrent sur elle, un petit sourire se dessina sur son visage. Elle s’avança au milieu des humains d’une démarche sensuelle et rejoignit le bureau de feu l’agent Sanchez. Elle s’installa dans le fauteuil et plongea son regard dans celui de l’homme face à elle.

– Bonjour. Je suis Nhilsa Andra, agent du SSC. (Lâcha-t-elle dans un murmure.)
L’homme lui sourit d’un air béa.
– Salut.
– Puis-je vous poser quelques questions ?
– Tout ce que vous voulez.
Elle lui sourit avec tendresse.
– Vous êtes adorable. (Elle se laissa aller dans son fauteuil et sortit un datapad.) Vous étiez le partenaire de Juan Sanchez ?
– On peut dire ça.
– Savez-vous sur quoi il travaillait avant sa mort ?
Il haussa les épaules.
– Aucune idée. Il est partit en disant qu’il voulait enquêter sur une affaire.
– Laquelle ?
– C’est bien là le problème. Il n’avait pas de dossier, ni à la main, ni sur son bureau.
Nhilsa plissa les yeux, sceptique.
– Vous voulez dire qu’il est partit pendant plus d’une semaine, sans raison ?
– Apparemment.
– Et ça n’a choqué personne ?
– Vous savez, Juan était plutôt… Bizarre.
– Comment ça ?
– Je ne devrais peut-être pas dire ça mais… Il était distant avec tout le monde et adepte de la théorie du complot. Rien ne lui convenait jamais, je crois même qu’il était dépressif. Et la synthèse, ça l’a pas mal traumatisé. Il arrêtait pas de dire que c’était anormal.
– S’il était aussi instable, pourquoi n’a-t-il pas été mit à pied ?
– J’ai pas dit qu’il était instable. J’ai dit qu’il était traumatisé. Mais c’était un bon enquêteur.
– Il ne supportait pas la synthèse ?
L’humain fit non de la tête d’un air peiné.
– Il était souvent sujet aux migraines et pestait contre ces implants en disant qu’il n’en avait jamais voulu.
– Je vois… Vous vous rappeler de quelque chose d’autre ?
Il secoua la tête.
– Je vous remercie.
La Turienne se releva et l’homme leva la tête vers elle.
– J’aurais dû le raisonner. J’étais prit par mon rapport et… Il n’avait rien à la main vous voyez ? Et il me disait : « Et ça, c’est quoi ? » Alors je lui ai répondu honnêtement : « Rien du tout ». Et je suis retourné à mes rapports et lui est partit.
– Ce n’est pas votre faute. (Le rassura-t-elle en pressant son épaule.)
L’agent opina tristement et retourna à ses rapports, délaissant la Turienne.Celle-ci s’éloigna et parcourut les bureaux, s’arrêtant devant chaque humain et les questionnant les uns après les autres. Mais toutes les réponses étaient à peu de choses près les mêmes.
– Il n’y a pas de section folie. Y’a pas d’autre affaire de ce genre, agent. (Déclara l’un d’entre eux.)
– Juan, il s’est fait des films. (Répliqua un autre.)
La jeune femme nota les données collectées et remercia les enquêteur avant de quitter les bureaux. Au détour d’un couloir, un sifflement attira son attention. La Turienne plissa les yeux et s’avança avec prudence, à l’affût, à la recherche de l’origine de ce bruit.
– La section folie existe… (Déclara quelqu’un, manifestement un homme, à voix basse.)
Il restait caché et jetait des regards anxieux autour de lui. Nhilas voulut s’approcher mais il recula hors de portée, visiblement terrifié.
– Qui êtes-vous ?
L’homme ne répondit pas de suite et regard à nouveau autour de lui avant de tendre l’oreille. Rassuré, il se rapprocha. Ses yeux brillaient d’un éclat inquiétant et repoussant qui donna la chair de poule à la Turienne. Celle-ci essaya de conserver une expression neutre.
– Je vous reconnais… (Dit-elle.) Vous étiez là haut, avec les autres. Pourquoi ne pas me l’avoir dit avant ?
– Ils mentent tous ! Ils m’observent. Juan n’était pas fou. Il était très lucide au contraire ! Il a découvert quelque chose… De gros ! Si seulement il était venu me trouver…
– Pourquoi mentent-ils ?
– Sais pas. (Lâcha-t-il, prit d’un spasme.) Vous voulez connaître la vérité ?
Elle opina.
– Dites-moi tout.
– Pas ici. Retrouvez moi devant les archives. Je vous montrerais tout ce qu’il vous faut savoir !


Second Epilogue

Matthieu Drew se frotta les yeux, accusant la fatigue d’être resté trop longtemps sur son écran. Il s’apprêtait à partir quand il reçut un mail. Il se renfrogna et se réinstalla dans son siège avant d’ouvrir la lettre. Elle provenait du système de surveillance du SSC et contenait une copie du fichier de vidéo surveillance. Matthieu attrapa son téléphone et contacta son supérieur.

– J’ai reçu la vidéo sur Juan, chef.
– J’arrive tout de suite.
Matthieu ne patienta que deux minutes avant l’arrivée de son patron dont les traits étaient tendus. Celui-ci se posta derrière l’ingénieur et regarda par dessus son épaule. Matthieu lança alors la vidéo. On pouvait voir Juan en pleine conversation avec un Turien dans les locaux du SSC.
– C’est quand il a demandé à accéder aux archives ? (s’enquit Jeck, son chef.)
– Oui.
« Juan tapa du poing et sortit des papiers de sa sacoche qu’il envoya sur le bureau du Turien. Ce dernier regarda les documents d’un air sceptique. »
– On peut zoomer ?
– Sans problème.
Un petit bruit retentit quand il commença à zoomer et ils sursautèrent.
– Qu’est-ce que c’est ? (S’enquit son supérieur.)
– Un autre mail.
– Je veux d’abord voir ça.
Matthieu tapota sur son clavier et fit rouler ses doigts sur une surface virtuelle ce qui eut pour effet d’agrandir la vidéo. Il poursuivit sa tâche jusqu’à ce que les documents soient clairement visible. Son supérieur resta interdit durant de longues secondes.
– Mais… Ce sont des feuilles vierges ou gribouillées…
L’ingénieur acquiesça d’un air peiné.
– Il était bel et bien fou… (Lâcha l’homme dans un soupir.)
Jeck se frotta le menton avec tristesse. Il avait espéré une explication logique, quelque chose qui aurait pu redorer le blason de l’agent. Mais c’était peine perdue.
– Chef ?
– Hum ?
Matthieu pointa l’écran du doigt, ouvert sur le second mail. Une autre vidéo était en lien, provenant de leurs propres locaux.
– C’est quoi ça ?
– Nos archives.
Il appuya sur lecture et la vidéo s’anima.
« La salle des archives était plongée dans une semi pénombre qui ne dura pas. La lumière s’alluma et une Turienne pénétra dans la salle. Elle s’arrêta, se tourna vers une pile de dossier et resta là quelques secondes. Puis elle opina et reprit sa route. »
– Mais qu’est-ce qu’elle fout ?
« Elle traversa toute la salle et se posta devant une table où reposait quelques piles de dossiers. Elle en attrapa un, l’ouvrit et le parcourut avant de le refermer et de le déposer sur le coté. Elle continua ainsi durant de longues minutes. Puis finalement, elle attrapa des feuilles de papier, les rangea dans un porte document et sortit. »
– Y’avait quoi sur ses papiers ?
– Aucune idée, chef. La caméra est mal placée. Mais elle s’est rendue au même endroit que Juan avant sa disparition.
Jeck poussa un juron.
– Comment elle a pu accéder aux archives ?
Matthieu haussa les épaules.
– Bande d’incapable…(Grogna Jeck.) ça date de quand ?
– Moins d’une heure.
– Alertez le SSC ! Dites leur que leur agent est compromis.
Jeck tapota sur le clavier et repassa la bande à l’envers jusqu’au moment où la Turienne se tournait vers la caméra, quelques secondes avant de sortir de la pièce. Il mit sur pause et zooma sur elle, dévisageant la jeune femme avec intérêt. Il nota l’éclat qui brillait au fond de ses yeux, celui qu’il avait pu voir dans le regard de Juan : L’éclat de la folie.
Il baissa la tête et poussa un soupir d’un air abattu.
– Et alertez moi les services médicaux… (Lâcha-t-il tout bas.)
– Chef ?
– Priez pour que ça ne soit pas contagieux…


Troisième Epilogue

Comment différencier la réalité du rêve ? Comment savoir ce qui est vrai et ce qui est imaginé ? Chacun à une version, une vérité, une réalité. Juan Sanchez était un agent du gouvernement terrien, qui travaillait dur et faisait preuve de sérieux dans son travail. Et pourtant, ses collègues ne firent aucune éloge à son sujet devant l’inspectrice du SSC enquêtant sur sa mort mystérieuse. Les documents qu’il avait prit s’était avéré être des faux et personne n’a jamais su sur quoi il enquêtait. Cela faisait partit de sa névrose, de sa folie.
Car, si vous preniez le temps de questionner les hautes sphères politique et militaire de la Terre au sujet du Normandy, tous vous auraient dit qu’il était toujours en service, que son équipage était le même depuis des années et qu’il était quelque part en mission d’exploration à la recherche de nouveaux monde à conquérir à l’aide de la terraformation. Toutes les informations recueillies par Juan étaient donc fausses, ou déclarées comme telles, car toutes avaient une explication autre qui était tout à fait envisageable et plus que plausible.

A partir de là, le doute n’était plus réellement permit. Ses accès de démence n’étaient pas à mettre sur le dos d’autre chose que son traumatisme dû à la synthèse. Car malgré les bienfaits de cette dernière, le trouble post traumatique de ce changement pouvait différer d’une personne à une autre et créer de grave dysfonctionnement de la pensée, voir même des hallucinations. Pour cela et bien d’autres raisons, on évitait de faire mention de la guerre quand on parlait de l’année sombre. Elle avait été difficile mais nécessaire et cela, personne n’en doutait. Le mot guerre tout comme l’acte avait une connotation négative, à la limite de la malédiction, du mauvais oeil. Bien que les races organiques se souvenaient des nombreux conflits qui avaient animé les histoires de chaque races, ils préféraient ne pas en parler et la honte pouvait se lire dans leurs yeux à l’évocation de ces moments douloureux.

A force de nier les choses, de refuser ce qui a été, on en vient à déformer la réalité. Comment demeurer clair et sain d’esprit dans une galaxie où des événements, certes sombres et traumatisants, mais bien réel, sont passés sous silence ? Comment faire la part des choses ? La question qui brûlait certaines lèvres était la suivante : Y avait-il réellement eu une guerre ? Personne ne donna de réponse à cette question. Ils semblaient tous vouloir la fuir, l’ignorer, comme si le simple fait de ne pas y répondre la rendait caduque et effaçait les événements qui y étaient raccrochés.

Les années passèrent, la question fut oubliée, les événements furent effacés des mémoires. Que ce phénomène, tout comme la paix, soit ou non l’oeuvre d’un mensonge n’avait finalement que peu d’importance. Les gens ignoraient ce qu’il s’était passé. Par choix, par omission, par oubli ou tout simplement parce qu’ils n’en savaient rien, au final, ils s’en fichaient. Car mieux valait une paix mensongère qu’une guerre déclarée. Et peu importait également si quelqu’un, quelque part, faisait des choses répréhensibles pour certains afin de préserver cette paix. Qu’elle soit factice ou non, elle était désormais la réalité, tout comme les Moissonneurs qui faisaient parti intégrante du paysage. Car ne pas se poser de question est le premier pas vers l’acceptation, le renoncement, la soumission. Car une fois que plus personne ne se soucis de quelque chose, que plus personne n’en parle ou le relaye, alors ce quelque chose, qu’il ait existé ou non ne fait plus partie de l’histoire. Et n’a donc jamais existé, que ce soit vrai ou non. Tout comme le Normandy qui ne revint jamais et dont les seules traces indiquaient sa destruction après la synthèse d’un coté et sa disparition en mission d’exploration de nombreux années plus tard de l’autre. Tout comme la photo dans la veste de Juan, celle de l’épitaphe au nom de Shepard qui fut retrouvée, brûlée, et oubliée.

Car il n’y avait pas de retour en arrière possible, pas d’autre alternative.

Car il n’y a pas plus aveugle que celui qui refuse de voir.

Car… Bienheureux sont les ignorants.

Fin.

par Mirlina

 

Rubrique imaginée par The Illusive Man et Simon N7, fan art de FemmeInfernale