Avant d'aller plus avant, voici le chapitre 7 qui pourrait être considéré comme un... interlude. Une remise en place des éléments...
Spoiler
Chapitre 7 : The End of Era/ La fin d'une ère.
Dans un passé lointain...
Le crépitement des flammes résonnait à ses oreilles. Il poussa un gémissement en se redressant. La douleur noyait ses sens et la fumée irritait son nez et sa gorge. Son esprit était engourdi et tournait au ralenti. Il prit une profonde inspiration et étrangla un cri. Une violente douleur le cisailla de l'intérieur.
- Côtes pétés... (Marmonna-t-il.)
Ses yeux pleuraient à cause de la fumée et il entendit quelqu'un tousser à coté de lui.
- Garrus ?
Le turien déblayait des débris sans prêter attention au sang qui coulait d'une blessure à sa tête. Joker claudiqua jusqu'à lui en grognant.
- ça va aller ? Où est Tali ?
Garrus ne répondit pas et continua de déblayer les décombres. Finalement, il se figea et une expression d'horreur se dessina sur son visage. Tali'Zorah était là, étendue sur le sol. Son sang formait une flaque sur le sol et sa combinaison était ouverte à de nombreux endroits. Garrus n'osa pas la toucher. Quand elle poussa un gémissement de douleur et bougea, il poussa une exclamation de soulagement et la prit dans ses bras.
- ça va aller, je suis là.
- Vakarian ? (Demanda-t-elle, à moitié inconsciente.)
- Je vous emmène à l'infirmerie.
Et ils quittèrent le cockpit, délaissant Joker qui les regarda s'éloigner.
- Je vais me débrouiller. (Murmura-t-il.)
Garrus et Tali rejoignirent le pont résidentiel et trouvèrent l'infirmerie bondée de blessés plus ou moins grave. Le docteur Chakwas allait à droite et à gauche, ne sachant plus où donner de la tête. Des corps s'entassaient dans le couloir et le chaos régnait. Garrus pénétra dans l'infirmerie et héla l'humaine.
- J'ai besoin d'aide ! Sa combinaison est percée !
Chakwas rejoignit le couple et examina rapidement la quarienne avec gravité.
- Dans le troisième tiroir il y a des seringues d'antibiotique.
Le turien alla les chercher et les donna au médecin qui fit une piqûre sans attendre.
- Allez dans l'une des chambre d'équipage, videz-là et stérilisez-là, je vais devoir lui retirer sa combinaison.
- Tout de suite.
Garrus sortit précipitamment de l'infirmerie. Il revint une heure plus tard pour découvrir encore plus de mort entassé dans le couloir. Fort heureusement, Tali n'en faisait pas partie. Il retourna dans l'infirmerie. Joker était allongé sur une table et un membre d'équipage le sondait à l'aide de son omni-tech. Chakwas était partout à la fois et la fatigue commençait déjà à se ressentir dans ses traits.
- La chambre est disponible.
- Bien. Emmenez-là dedans et préparez moi une tenue stérile.
Garrus acquiesça puis emmena sa compagne comme demandé. Il la déposa dans la pièce avec délicatesse et resta à la regarder un instant. Tali tourna vers lui son regard.
- Garrus...
- Je suis là.
- J'ai mal...
- Je sais, le docteur Chakwas va vous soigner. Tout ira bien.
- Je vous aime... (Murmura-t-elle.)
Ses paupières étaient lourdes et s'abaissèrent doucement.
- Non, ne faites pas ça ! (Cria Garrus avant de reprendre d'une voix plus douce.) Ne faites pas ça... Ne vous endormez pas...
- Je n'ai plus la force...
Le turien déglutit et sentit un frisson de terreur parcourir son échine. Ses yeux s'humidifièrent et il parla d'une voix quelque peu tremblante.
- Ne m'abandonnez pas, Tali... Ne m'abandonnez pas. Je vous aime.
- Garrus...
- Je vous en prie.
Des larmes roulèrent sur les joues de la quarienne.
- Je... (Commença-t-elle doucement.)
Le docteur Chakwas arriva derrière le couple.
- Garrus, vous risquez de la contaminer.
Le turien ne la regarda même pas et prit la main de Tali dans les siennes, la pressant doucement pour la forcer à rester éveillée.
- Ne faites pas ça. Ne faites pas celle qui me dit adieu.
Chakwas se posta aux cotés du turien et commença à examiner la quarienne.
- Tali, écoutez-moi, il est important que vous restiez éveillée.
- Je ne peux pas, docteur...
- Si, vous pouvez. Je sais que c'est dur, mais vous devez rester éveillée, c'est impératif. D'accord ?
- Tali...
La quarienne opina après quelques secondes.
- Bien. Garrus, sortez s'il vous plait.
- Je préférerais rester.
- Nous devons réduire les risques de contamination.
Le turien poussa un soupir de résignation.
- D'accord. Je reviendrais vite, Tali.
La quarienne regarda son compagnon partir, le coeur lourd. Une fois qu'il eut quitté la pièce, elle se tourna vers Chakwas.
- Dites-lui que je n'ai pas souffert... (Murmura-t-elle.)
Et elle ferma les yeux.
Liara était épuisée. Elle avait apporté autant d'aide que possible durant les heures ayant suivi le crash, soutenant au mieux le docteur Chakwas. Mais désormais, elle tombait de fatigue. Le nombre de blessé grave était important et le bilan des morts plus encore. Et il ne cessait de grimper. L'Asari regarda les corps, la gorge serré et fut heureuse que Shepard ou ses amis n'y figurent pas. Elle se sentit aussitôt coupable pour de telles pensées et pourtant, son soulagement lui était agréable.
IDA avait été absente durant de longues heures, déconnectée en même temps que la plupart des systèmes du vaisseau. Mais l'IA était de retour et avait rétabli tout ce qui pouvait l'être. Sa voix avait redonné espoir à Joker et son retour avait grandement facilité la gestion des blessés. Mais le corps d'IDA était à jamais brisé : Le Normandy était échoué et le resterait. Il ne volerait plus jamais. Garrus s'arrêta à coté d'elle et demeura silencieux. Quand elle le vit, elle sursauta.
- Garrus ! Je ne vous avais pas vu.
- ça fait beaucoup de monde, hein ?
- Oui...
- Alors, Shepard est tirée d'affaire ?
- Oui.
- C'est une bonne nouvelle. Où est-elle ?
- Elle est assoupie. Elle s'est cognée la tête lors de la collision.
Le turien émit un petit râle de satisfaction.
- Et Tali ?
Vakarian baissa les yeux, mal à l'aise.
- Le docteur Chakwas a réussit à la stabiliser mais elle demeure faible. Elle a attrapé beaucoup de bactéries ou de virus, je sais pas trop. Enfin bref, elle n'est pas encore tirée d'affaire.
- Elle va s'en sortir. (Affirma Liara, confiante.) C'est une battante.
Le silence s'installa et l'Asari nota la peur dans le regard de son ami.
- Garrus ?
- Je ne sais pas ce que je vais faire, si jamais elle...
Il se tu, la voix brisée par l'émotion. Liara le prit dans ses bras pour le réconforter.
- Ne pensez pas à ce genre de chose, Garrus.
Le turien demeura silencieux un moment avant de s'écarter et d'opiner.
- Comment faisiez-vous ?
- A quel sujet ?
- Pour regarder celle que vous aimez braver des dangers tous plus grands les uns que les autres. Pour la regarder souffrir ainsi. Sans pouvoir l'aider...
- J'accompagnais Shepard à chaque fois. Et je partageais ses souffrances.
- Vous n'étiez pas là, lors de l'attaque sur la base des récolteurs.
- Et je crois n'avoir jamais autant souffert avant cela. Elle était loin de moi et je ne pouvais cesser de penser à elle, de m'inquiéter pour elle. J'avais peur Garrus. J'étais totalement impuissante. Et j'en souffrais énormément. Et depuis que je l'ai retrouvé, je ne l'ai plus jamais quitté. Même si cela signifie la regarder souffrir...
Le turien opina sombrement.
- Merci, Liara.
- Je vous en prie.
Garrus s'en retourna et la voix de Liara l'arrêta.
- Elle va s'en sortir. (Déclara l'Asari, confiante.)
- Vous pouvez me le promettre ? (S'enquit-il.)
Elle ne répondit pas et il reprit sa route. Il y avait beaucoup à reconstruire. Liara regarda son ami s'éloigner avec peine puis alla dans sa chambre. Shepard était là, allongée sur le lit. Liara s'approcha et caressa du bout des doigts la peau à nue de son amante. Puis, elle se déshabilla et se plaça à ses cotés avant de s'endormir, épuisée.
A son réveil, Shepard n'était plus là. Liara s'habilla en hâte et rejoignit l'infirmerie. La plupart des corps avaient été déplacés et le docteur Chakwas prodiguait des soins à ses patients. Liara s'informa et aida du mieux qu'elle put. Elle apprit que Mirlina, Garrus et quelques autres s'occupaient d'enterrer les morts. Au bout d'une dizaine d'heure environ, elle surprit Shepard et Chakwas en pleine discussion dans les quartiers de l'équipage.
- Plus de la moitié de l'équipage est mort. (Commenta Chakwas, le visage creusé par la fatigue.)
Shepard opina.
- Cela aurait pu être pire. (Déclara-t-elle avec gravité.)
- C'est triste à dire, mais oui. Laissez-moi vous examiner.
- Comment se portent les blessés ? (S'enquit Mirlina, changeant ainsi de sujet.)
Chakwas se pinça les lèvres.
- Traynor s'en remettra ainsi qu'Adams et Donnelly. Daniels est morte hier soir. Et... Joker ne marchera plus jamais.
- Je croyais qu'il n'avait que quelques côtes brisés ?
- En sortant du cockpit. Mais il c'est cassé les jambes en descendant de la passerelle. Et je n'ai plus son traitement.
Shepard opina sombrement.
- Et pour Tali ?
- Elle vivra. Mais elle ne se remettra jamais. Son coeur est très affaibli. Elle devra passer le restant de sa vie dans une seule pièce, condamnée à ne jamais revoir la lumière du jour.
- Il n'y a plus de combinaisons ?
- Aucune qui soit étanche et adaptée à sa morphologie.
Shepard absorba les nouvelles, le visage grave.
- Je vais l'annoncer à Garrus.
- Je peux m'en occuper.
- Non. C'est mon équipage. C'est à moi de le faire. (Elle marqua une pause.) Tout ceci est de ma faute. (Finit-elle par affirmer.)
- Ne dites pas de bêtises.
- J'ai échoué.
- Vous avez fait ce que vous avez pu.
- Non ! J'aurais pu faire plus, j'aurais du faire mieux. Je suis responsable.
- Shepard...
- Je vais voir Garrus.
- Et pour votre examen ?
- Une autre fois, docteur. Il y a plus important.
Et elle quitta la pièce, laissant Chakwas seule. Celle-ci secoua doucement la tête, peinée.
Liara regarda son amante s'éloigner avec tristesse avant de retourner dans sa chambre.
Mirlina se tenait dans sa cabine dévastée depuis de longues minutes, pensive. L'odeur de poisson mort flottait dans l'air et lui donnait la nausée. Son lit était enfoui sous un tas de gravats, et la moitié du plafond s'était écroulé. Son bureau était en miettes et ses maquettes dispersées dans la pièce. Elle avait ressentit la mort de ses compagnons, elle avait vu et vécu des horreurs. Son équipage avait souffert, beaucoup étaient morts par sa faute. Et l'état de sa cabine n'était qu'un reflet de plus de son pitoyable choix, de son entêtement, de son funeste échec. A l'image du Normandy. Elle laissa des larmes rouler sur ses joues. Comme il avait été difficile d'annoncer la nouvelle à Garrus. Plus dur encore de voir sa réaction. Elle lui avait demandé pardon. Il n'avait pas répondu. Shepard se détourna de ce triste spectacle et se dirigea vers sa nouvelle cabine, celle qu'elle partageait avec Liara. L'Asari était déjà là.
- Bonsoir, Mirlina. (Dit-elle de sa voix douce et chaleureuse.)
- Bonsoir, Liara.
Shepard la contempla un long moment sans rien dire. Elle s'approcha et caressa son visage avec douceur. Liara sourit et ferma les yeux, profitant de cet instant. La beauté de l'Asari frappa Shepard qui sentit le désir monter au fond d'elle, accompagné de son sentiment de culpabilité. A contrecœur, elle se détourna.
- Mirlina ? (Demanda doucement Liara.)
- Je ne te mérite pas... (Murmura l'humaine d'une voix tremblante.)
Des larmes roulèrent sur ses joues et l'Asari ressentit toute la peine et la détresse de son amante.
- Pourquoi dis-tu ça ?
- Je vous ai tous abandonnés...
Liara se colla dans le dos de son amante et la blottit contre elle.
- J'ai surprit ta conversation avec Chakwas. Tu n'as pas échoué.
- Tu ignores ce que j'ai fait.
- En réalité... Si. Je le sais. (Répondit l'Asari après un instant d'hésitation.) J'ai vu ce souvenir en toi.
- Je vous ai tous trahit. (Insista Shepard.)
- Non, mon amour. Tu as refusé de céder, de devenir son jouet.
- Et à quel prix ? Si j'avais choisit, si j'avais accepté, nous n'en serions pas là...
Liara invita son amante à se retourner et essuya délicatement ses larmes avant de lui relever la tête avec douceur.
- Tu ne peux pas savoir.
- J'aurais dû faire un choix... Je pouvais les sauver... J'aurais dû les sauver !
- Tu as fait ton maximum et ce que tu croyais juste. Comme lors de la destruction du relais Butarien.
- J'ai trahit tout le monde ! (Hurla-t-elle, en larmes.) Hackett, mon équipage, l'humanité, toutes les races... Toi...
- Tu n'as trahit personne. Le poids sur tes épaules était immense. Personne n'aurait pu accomplir autant, n'aurait pu faire ne serait-ce que la moitié de ce que tu as fait.
Mirlina dévisagea longuement son amante.
- Je ne sais pas quoi faire... (Murmura-t-elle.)
- Vit, mon amour.
- Comment vivre après ça ?
Liara caressa doucement son visage, un sourire triste sur les lèvres.
- Comme ça... (Dit-elle dans un souffle.) Près de moi. Avec moi.
- Je ne peux pas les oublier.
- Cesse simplement d'y penser. Ne regarde que moi. Ne pense qu'à moi.
Elle s'approcha et déposa un baiser sur les lèvres de l'humaine. Mirlina frémit légèrement. Elle lui rendit son baiser avec douceur et l'enlaça.
- Je t'aime... (Susurra l'humaine.)
- Moi aussi, mon amour.
- Prouve-le... (Lui demanda Mirlina d'une voix presque suppliante.)
Liara sourit et embrassa son amante tout en l'entraînant vers le lit. Elle se laissa glisser dessus et attira Mirlina contre elle. Elle lui enleva son t-shirt et déposa des baisers dans son cou. Ses mains caressèrent son ventre et son dos. Mirlina poussa des soupirs de plaisirs et la serra contre elle, son désir croissant. Ses mains coururent dans le dos de l'Asari et trouvèrent la fermeture éclair de sa combinaison. Elle la fit lentement descendre, découvrant peu à peu son corps, le dévorant des yeux et des lèvres. Liara glissa hors de son vêtement et retira lentement le pantalon de son amante. Elle se redressa et tâtonna le dos de l'humaine à la recherche de la fermeture de son soutien gorge qu'elle dégrafa. Elle embrassa ses tétons avec douceur. Sa langue les titilla et elle prit plaisir à les sentir durcir. Elle fit glisser ses doigts sur la peau de l'humaine jusqu'à son entrejambe et le caressa. Mirlina l'attira contre elle en gémissant de plaisir, tremblante de désir. Elle dévora les lèvres de l'Asari, attarda sa bouche sur sa poitrine et ondula contre elle. Ses mains caressèrent sa peau et s'attardèrent sur les zones érogènes. Elle vibra de plaisir en constatant celui qu'elle apportait à son amante. Liara étreignit l'humaine avec force, frottant son corps contre le sien. Elles soupirèrent de désir, de satisfaction, la respiration saccadé durant de longues minutes, intensifiant leurs mouvements en quête de plaisir. Les derniers jours ne comptaient plus. La souffrance et la mort avaient été balayés dans ce seul instant de bonheur, d'union passionnelle. Mirlina s'accrocha à son amante avec force, tremblante.
- Je t'aime... (Lui susurra-t-elle à l'oreille.)
- Je t'aime aussi. (Répondit Liara avec tendresse.)
Elles s'endormirent ainsi, lovées l'une contre l'autre.
Liara se réveilla la première. Elle contempla le corps de Shepard toujours assoupie et observa sa poitrine qui se soulevait de façon régulière. Elle caressa sa peau du bout des doigts, donnant des frissons à son amante. Elle sourit béatement. Elle se sentait bien, elle était heureuse. Un court instant, elle pensa à tous ceux qui avaient perdu la vie et le chagrin l'accabla. Mais la joie reprit vite le dessus, ne laissant qu'un vague sentiment de culpabilité qui s'effaça bien vite. Elle caressa les cheveux de Mirlina, retirant une mèche rebelle de devant son visage avant de déposer un baiser sur ses lèvres. Puis, elle se leva et se racla la gorge avant de s'installer dans son fauteuil. La plupart de son matériel de courtière était détruit, et ce qui lui restait ne lui était pratiquement plus d'aucune utilité. Elle tapota sur son clavier et enclencha l'enregistreur vocal après avoir prit une profonde inspiration.
- Journal du docteur Liara T'Soni, à bord de ce qui fut le SSV Normandy SR2, année 2187. Je ne sais pas par quoi commencer. Je pense que la première chose à faire est de vous parler de la guerre que nous avons mené...
Les jours passèrent, les années suivirent et un semblant de vie communautaire s'installa. L'équipage était sans nouvelle du reste de la galaxie depuis bien longtemps, ignorant tout de la poursuite de la moisson ou de l'éradication des survivants. Ils n'avaient pas oublié. Ils avaient simplement cesser d'y penser pour se protéger eux même de la mélancolie et de la folie. Car se ronger les sangs n'aurait servit à rien. Car désormais seule comptait la survie. Car ils ne pouvaient rien faire. Un hommage avait été rendu aux morts. Une plaque au nom de l'Amiral Hackett avait rejoint celle de l'Amiral Anderson. D'autres noms avaient suivit dont celui d'Ashley, de James, de Cortez...
Joker fut le premier des survivants à mourir. IDA demeura par la suite très silencieuse, n'acceptant de parler qu'à Shepard et Liara en de trop rares occasions. Tali'Zorah fut la suivante et Garrus se renferma sur lui même, inconsolable. Il y eu d'autres morts, souvent à cause de maladie. Petit à petit, la communauté se réduisit.
Liara avait continué de travailler sur son projet, intégrant toutes les données possibles dans l'ordinateur pour guider les générations futures dans le cycle suivant. Elle avait vécu des années de bonheur auprès de Shepard, un bonheur sans faille. Elles étaient maintenant parents de deux petites filles qu'elles élevaient au mieux. Liara avait eu une idée dont elle n'avait pas parlé à Mirlina : Se faire cryogéniser toutes les quatre pour pouvoir vivre dans le cycle suivant, pouvoir vivre en paix, libre, sans le menace des Moissonneurs.
- Je vais lui en parler. (Se décida-t-elle.)
L'Asari quitta la base et partit vers les débris du Normandy qui avait été réaménagés autant que possible pour pouvoir y vivre correctement. Elle salua ses amis et ses filles qui jouaient dehors et rejoignit sa chambre.
- Bonjour, mon amour ! (Lança-t-elle d'un ton joyeux.)
Mirlina se tourna vers elle et la dévisagea longuement, comme pour la première fois.
- ça ne va pas ?
L'humaine se massa le crâne et secoua doucement la tête.
- J'ai mal au crâne.
- Encore ?
- Ce n'est rien, ça va passer.
- Tu en as parlé à Karin ?
Shepard sourit.
- Elle est à la retraite maintenant.
- Ce n'est pas drôle.
- Ce n'est rien, juste un petit peu de...
Elle se figea et poussa un gémissement comme une violente douleur explosait dans son crâne. Liara regarda son amante avec horreur et se précipita vers elle. Quelque chose coula du nez de Shepard et goutta sur le sol. C'était du sang.
- Je t'emmène à l'infirmerie.
Liara passa le bras de Shepard par dessus son épaule et se dirigea vers la porte. Mais les jambes de l'humaine se dérobèrent et le couple tomba lourdement au sol.
- Mirlina ! (Appela Liara, paniquée.)
L'humaine avait les yeux fermés et peinait à respirer. Du sang s'écoulait de son nez et elle était en sueur.
- Au secours ! J'ai besoin d'aide ! (Hurla-t-elle à la cantonade.) Mirlina ! Réveille-toi ! Mirlina !
Chakwas se pencha péniblement au dessus du corps de Shepard et utilisa son omni-tech pour scanner son crâne.
- IDA, tu peux m'afficher ça sur l'écran là bas ?
- Oui, docteur.
Les résultats apparurent sur un grand écran au fond de la pièce et Karin s'en approcha pour examiner tout cela de plus près. Liara était aux cotés de Shepard et lui tenait la main, l'inquiétude creusant son visage.
- Qu'est-ce qu'elle a ? (S'enquit-elle d'une petite voix.)
- IDA, grossit moi cette zone s'il te plait.
L'IA s'exécuta. Chakwas observa attentivement l'image durant de longues minutes, la faisant pivoter, revenant en arrière, grossissant d'autres zones.
- C'est une tumeur... (Finit-elle par dire.)
- Quoi ? (Demanda Liara, effrayée.)
Chakwas se tourna vers elle et plongea son regard dans celui de l'Asari.
- Une tumeur maligne.
- C'est impossible... On l'aurait vu plus tôt...
- Sans savoir quoi chercher, c'est très dur à localiser. Surtout avec si peu d'équipement. Surtout dans cette zone.
- Où est-elle située ?
- Dans la zone de la mémoire.
- C'est opérable ?
Chakwas secoua doucement la tête.
- Non, Liara. Pas avec si peu de moyen. C'est une opération trop délicate.
Liara déglutit, les yeux embués de larmes.
- Combien de temps ?
- Je ne saurais dire. Je ne connais pas la vitesse de développement. Il me reste de quoi ralentir la dégénérescence. Six mois. Un an. Cinq ans. Au maximum une dizaine d'années si ça se développe lentement.
- Que va-t-il se passer ?
- Elle aura des migraines. De violentes migraines. Il est possible qu'elle ait également des pertes de mémoire et d'équilibre voir des sautes d'humeur.
Liara regarda Mirlina en pleurant.
- Va-t-elle m'oublier ? Nous oublier ? (Demanda-t-elle d'une voix brisée.)
- Je ne puis en jurer. Je pense que non. Mais il faudra que vous soyez fortes, toutes les deux.
Liara opina et Karin la laissa seule avec son amante. L'Asari veilla sur elle durant de longues heures. Et quand Mirlina se réveilla, elle ne sut comment le lui annoncer.
Les mois passèrent. Mirlina eut de nouvelles migraines. Parfois, elle était joyeuse et souriante, d'autres fois maussade et grognon. Un rien pouvait la contrarier et elle s'enfermait parfois durant de longues heures, seule. Elle se brisa le bras une fois en tombant et son corps se couvrit peu à peu d'hématome suite à ses chutes. De temps à autres, sa mémoire flanchait. Parfois, elle se réveillait en pleine nuit en hurlant. Mais Liara ignorait pourquoi. Mirlina semblait rongée de l'intérieur et pas uniquement par sa maladie. L'Asari voulait l'aider, mais le silence de Shepard l'en empêchait et elle en souffrait.
Ce jour là, quand Liara rentra dans la chambre, elle n'y trouva pas Shepard. Elle fouilla les restes du vaisseaux et les autres cabines, s'informa auprès de l'équipage. Shepard avait été vu du coté de l'infirmerie par quelqu'un, vers les tombes de l'équipage par un autre. Personne n'avait la même version. A la tombée de la nuit, Liara retourna dans sa cabine, très inquiète. Elle entendit un grattement et alla dans la salle de bain. Mirlina était là, assise par terre, l'eau ruisselant sur son corps. Elle grattait de temps à autre le mur, l'air ailleurs.
- Mirlina ? (L'appela Liara avec douceur.)
L'humaine ne réagit pas. Liara se plaça face à elle et se mit à genou. Elle posa une main sur la joue de son amante et l'amena à la regarder.
- Mirlina ? (Répéta-t-elle.)
L'humaine la dévisagea un long moment sans comprendre.
- Je... (Elle regarda lentement autour d'elle, prenant enfin compte de son environnement.) Je ne comprend pas...
- Tu es là depuis longtemps ?
- J'ignore... J'ignore comment je suis arrivée ici... Je ne me souviens pas de ma journée...
Liara la regarda avec peine et douleur. Voir son amour dans un tel état la faisait souffrir.
- Allez viens, tu vas attraper froid à force.
Liara aida Shepard à se relever et la sécha avant de la mettre au lit. Mirlina se laissa faire, perdue dans ses pensées.
La maladie rongeait peu à peu son esprit et émoussait ses capacités. Elle était de plus en plus souvent absente, éloignée, coupée du monde. Mais parfois, elle était totalement présente et l'amour du couple explosait alors comme si le mal n'avait jamais existé. Liara chérissait ces moments là qui se faisaient de plus en plus rares avec le temps.
Avec les années revinrent les cauchemars. Très faibles au début, ils se mirent à ronger l'esprit de Shepard et lui firent perdre pied à plusieurs reprises. Elle hurlait et se débattait, affolée. Les morts revenaient la hanter. Un jour, Liara pénétra dans la chambre et la trouva sous la douche, toute habillée. Shepard se tenait dos à elle, les yeux fermés. L'Asari s'approcha d'elle et posa une main sur son épaule. Mirlina hurla et sursauta, le visage déformé par la terreur. Elle recula précipitamment contre la cloison du fond et fondit en larmes. Liara hésita un instant avant de la serrer contre elle.
- Encore ?
L'humaine opina et se blottit contre l'Asari en pleurant.
- Je suis désolée.. (Murmura-t-elle.) Je suis désolée...
Liara secoua doucement la tête.
- De quoi ?
- D'être un fardeau...
Elle releva le visage de l'humaine et la regarda avec tendresse.
- Ne dis jamais ça, mon amour. Ce n'est pas vrai.
Elle coupa l'eau et l'entraîna dans la chambre avant de lui passer une serviette sur les épaules. Puis, elle l'aida à s'asseoir, dissimulant au mieux la tristesse et l'angoisse dans son regard. Shepard regardait le sol, sans volonté. Liara caressa son visage et l'attira vers elle.
- Mirlina...
L'humaine tourna son regard vers l'Asari, en pleurs.
- Chaque fois que je ferme les yeux, je les vois. Ils m'accusent, me pointent du doigt. Leurs corps tombent en lambeaux, mais ils continuent. Inlassablement... Je les vois tout le temps...
- ça va aller... (Répondit Liara.)
Shepard secoua lentement la tête.
- Aide-moi... (Lui demanda-t-elle d'une voix suppliante.)
Liara la dévisagea sans comprendre, le coeur brisé de voir son amante aussi défaite.
- Comment ?
- Aide-moi à oublier...
- Mirlina...
- Je t'en prie...
- Je ne peux pas faire ça...
- Je t'en prie, Liara, fait que ça s'arrête... Fait que ça s'arrête... (La supplia Mirlina en pleurant.)
Liara opina doucement.
- D'accord, mon amour. D'accord.
Mirlina se blottit contre elle et Liara la berça doucement. Elle inspira profondément. Ses pupilles se dilatèrent et ses yeux virèrent au noir.
Les cauchemars diminuèrent et disparurent en quelques semaines. Le couple connut alors une accalmie de quelques années. Mirlina redevint souriante, pleine de joie de vivre. Elle s'occupa de ses filles, passa du temps avec Liara. La petite famille vécut des moments de bonheur que rien ne vint gâcher. Leur bonne humeur fut contagieuse et toucha leurs amis. Il y avait parfois des mauvais jours, mais ils demeuraient rare. Mirlina développa sa complicité avec ses filles et en particulier Itany. Elle fit l'amour avec Liara aussi souvent que possible, profitant de ce sursis. Le couple éduqua ses filles dans le respect de la vie, quel que soit la race, dans la volonté de se battre pour pouvoir vivre en paix. Avec pour projet de vivre dans le prochain cycle.
Mais la tumeur était toujours là et lorsqu'elle revint, ce fut avec tant de force qu'elle assombrit l'avenir...
Dans un passé lointain...
Liara était au chevet de son amante, tenant sa main dans la sienne, la tristesse se peignant sur son visage. Elle caressa le front de Shepard avec douceur. Celle-ci grogna légèrement de douleur comme elle prenait une inspiration.
- Nous n'avons pas eu assez de temps pour nous... (Déclara Liara, les larmes aux yeux.)
- Je t'ai aimé. A chaque instant, d'un amour sans faille, sans jamais douter, sans ressentir le moindre regret... Si ce n'est n'avoir pu t'offrir une vie de paix. (Murmura Mirlina d'une petite voix.)
Son visage était creusé par la fatigue et des cernes noires. Sa peau était devenu d'une pâleur des plus inquiétantes.
- Je n'ai pas de regret non plus, mon amour.
L'humaine sourit tendrement à l'Asari.
- Tu prendras soin d'elles, n'est-ce pas ?
- Comme de toi.
Mirlina opina et tendit la main vers sa table de nuit pour attraper un paquet qu'elle tendit à son amante.
- Quand elles seront prêtes.
- Qu'est-ce que c'est ?
- Des souvenirs.
Liara serra le paquet contre son coeur.
- Je le leur donnerai. (Promit-elle.)
Mirlina pressa la main de sa compagne pour la remercier.
- J'ai froid... (Murmura Shepard après un moment.) Tu veux bien rester avec moi ?
Liara opina, des larmes roulant sur ses joues.
- Jusqu'au bout... (Dit-elle dans un souffle.)
Mirlina plongea son regard au fond du sien.
- Je t'aime.
- Je t'aime aussi, Mirlina. Et... J'aurais voulu pouvoir te le montrer encore... Te le montrer plus...
- Tu l'as fait. Chaque jour que nous avons partagé. Et tu m'as rendu heureuse.
Liara éclata en sanglot.
- J'ai peur. (Murmura-t-elle.) J'ai peur d'être seule, de ne pas être à la hauteur.
- Je serais toujours avec toi, dans ton coeur.
- C'est tellement injuste.
- Ne pleure pas, mon amour, je t'en prie... Tu devras être forte. (Murmura Mirlina d'une voix faible.)
L'Asari opina et essuya ses joues, les yeux toujours embués de larmes, mélancolique. Elle serra la main de son amante et embrassa ses doigts.
- Je serais forte. (Lui assura-t-elle.)
Mirlina sourit et elle tourna le regard vers le plafond avant de fermer les yeux. Elle gémit légèrement comme la douleur revenait, lui donnant l'impression que son cerveau était comprimé, enserré dans un étau. Elle rouvrit les yeux et inspira profondément, avec difficulté. Quelques spasmes secouèrent son corps.
- Chuuut, je suis là, mon amour... (La rassura Liara, caressant son front.)
- J'aurais voulu leur dire au revoir... Mais je ne veux pas qu'elles aient ce souvenir là...
- Tu es sûre ?
L'humaine opina.
- Elles vont vivre... Et tu seras là pour elles. Je suis en paix.
Liara épongea le front de son amante dont la douleur s'accentuait de seconde en seconde. Elle gémit de nouveau et l'Asari pressa ses doigts pour la réconforter. L'humaine respira avec difficulté et tourna son regard vers sa compagne. Elle lui sourit avec reconnaissance avant de fixer de nouveau son regard vers le plafond.
- Nous ne nous sommes même pas mariées... (Murmura-t-elle après quelques minutes, d'une voix éteinte.)
- Il n'est pas trop tard. Cela te ferait plaisir, mon amour ? (S'enquit Liara avec tendresse.)
Seul le silence lui répondit.
- Mirlina ? (Souffla-t-elle avec inquiétude.)
Mais l'humaine n'eut aucune réaction. Ses muscles se détendirent et ses doigts se desserrèrent. Liara sentit sa gorge et son estomac se nouer. Des larmes perlèrent à ses yeux et son coeur accéléra ses battements, tels des coups de marteaux dans sa poitrine. Elle posa une main sur la joue de son amante et tourna son visage vers elle pour plonger son regard dans le sien. Les yeux de l'humaine fixèrent un point à la gauche de Liara et restèrent inertes, froids, vides et sans vie. Alors, l'Asari éclata en sanglot et se blottit contre le corps encore chaud de Shepard. Elle demeura ainsi, sans bouger, durant une éternité, inconsolable.
Les années passèrent et la communauté se réduisit encore jusqu'à disparaître. Liara demeura seule avec ses filles. Le chagrin de l'être aimé ne disparut jamais, même après plus d'un siècle. Aimante, tendre et attentionnée, Liara n'en demeurait pas moins mélancolique. Kayla et Itany ne la virent que rarement sourire. Régulièrement, l'archéologue pleurait. Shepard lui manquait, tout comme à ses filles.
Le temps avait laissé son empreinte sur l'Asari, marquant anormalement son visage au vu de sa jeunesse. Itany avait questionné une fois sa mère à ce sujet : Pourquoi ? Mais celle-ci avait éludé la question et la jeune femme n'avait pas insisté. Désormais, elle se tenait dans l'ancienne soute du Normandy et se préparait aux cotés de sa soeur.
- J'ai du mal à croire que le jour j soit arrivé. (Déclara Itany.)
Kayla se tourna vers elle et lui sourit en voyant son air débraillé.
- Finit de t'habiller. Il ne faudrait pas que tu tombes malade durant le trajet.
- Tu arrives à y croire toi ?
- Difficilement. On va se réveiller dans un cycle dont on ignorera tout. Mais Maman sera là pour nous aider.
Itany opina.
- J'espère qu'elle retrouvera le sourire.
- Papa lui manque.
Itany conserva le silence un instant.
- A moi aussi. (Finit-elle par confier tout bas.)
Kayla se pinça les lèvres et prit sa soeur dans ses bras.
- Papa nous aimait. C'est tout ce qui compte. Finit de t'habiller, chérie.
Liara regardait ses filles à travers la baie vitrée du poste de contrôle. Elle tenait dans ses mains un cadre photo à l'image de Mirlina.
- Si tu pouvais voir nos filles maintenant, mon amour. Tu serais fière.
Elle regarda le visage figé de son amante avec mélancolie.
- Tu me manques tant.
- Êtes-vous sûre de votre décision ? (Demanda la voix d'IDA.)
Liara demeura silencieuse quelques secondes avant d'opiner et déposa le cadre.
- Absolument.
- Elles seront prises au dépourvu.
- Je sais. Mais elles feront face.
- Il y aurait suffisamment d'énergie pour vous, Liara. Vous pourriez les suivre si vous le souhaitiez.
- Si je le souhaitais. (Répondit-elle d'une voix douce.)
- Ne les aimez-vous donc pas ?
- Oh, bien sûr que si, IDA. Elles sont toutes ma vie. C'est bien pour cela que j'ai fait tant d'enregistrement et que j'ai minutieusement préparé leur voyage.
- Mais vous ne les accompagnez pas.
Liara inspira profondément et la douleur passa dans son regard.
- Je ne veux pas vivre dans un futur en paix sans Mirlina.
- Shepard aurait voulu que vous viviez. Que vous continuiez avec vos filles.
Liara sourit avec tendresse.
- Mirlina voulait beaucoup de chose pour moi mais également pour les autres. (Elle marqua une pause.) Mais je n'ai plus la force.
- Vous vous laissez mourir, Liara.
- C'est plus compliqué que ça.
- Vous êtes atteinte de mélancolie.
- Je sais.
- Vous pourriez la combattre.
Liara secoua doucement la tête.
- Non, IDA. Comme tu l'as dit, je ne m'en suis jamais remise. Je suis... (Elle chercha ses mots.) Sans volonté.
IDA ne répondit pas immédiatement.
- Je comprend. (Finit-elle par dire tout doucement, avec tristesse.)
- Tu es sûre de vouloir le faire ?
- Oui. Je veillerais sur leur sommeil et je les réveillerais.
- Merci. Je suis désolée de te demander un tel sacrifice. Mais Glyphe en serait incapable.
Le drone se réveilla à l'évocation de son nom et tourna autour de Liara.
- Je veillerais sur les données et je guiderais au mieux les générations futures, docteur T'Soni.
- Je n'en doute pas, Glyphe.
Le drone tourna encore un peu avant de retourner sur son support et de se désactiver.
- C'est pour vous que je m'inquiète, Liara. Vous serez définitivement seule une fois que je serais téléchargée dans la base et que vos filles seront en sommeil.
- Je le sais. Ainsi, elles seront en sécurité. Je ne veux pas qu'elles me voient décliner et m'éteindre.
- Les Asaris ont une espérance de vie d'un millénaire.
- Mais je ne vivrais pas aussi longtemps. Tu le sais très bien.
- Oui... Cela me fait juste de la peine.
Le silence s'installa. Liara reporta son regard par la baie vitrée et observa ses filles.
- Elles sont prêtes. Et toi ?
- Je suis prête également.
- Alors allons-y.
La neige recouvrait tout d'un épais manteau blanc et un vent glacé soufflait. Le trio s'avança dans le froid, en silence. Elles mirent près de deux heures pour atteindre la base. La neige rendait la progression difficile, chaotique. Elles pénétrèrent tant bien que mal dans la grotte. Liara reprit son souffle puis se dirigea vers le terminal au centre de la pièce qu'elle mit sous tension. Elle vérifia les données et ouvrit les accès avant de faire un lien avec l'ordinateur du Normandy. IDA se transféra dans la base et Liara coupa les connections.
- Tout est en ordre. (Annonça IDA.)
Liara retourna auprès de ses filles et les prit dans ses bras. Itany trembla légèrement.
- Tu as froid ? (S'enquit sa mère.)
La jeune femme secoua la tête.
- Non. J'appréhende, c'est tout.
Liara sourit et lui caressa la joue.
- Tout ira bien, mon trésor. Tu vas t'endormir et rêver. Et quand le moment sera venu, tu te réveilleras. (Elle marqua une pause avant d'ajouter.) Vous vous réveillerez toutes les deux.
- Et toi aussi, Maman. (Lui répondit Kayla.)
Liara opina simplement.
- Je vous aime, mes chéries.
- Nous aussi, Maman.
Elles s'étreignirent, puis Liara les conduisit jusqu'aux caissons qu'elle mit en route. Kayla s'allongea dans le sien et Itany fit de même. Liara prit le temps de leur dire au revoir, de graver ces images dans son esprit. Elle les embrassa avec tendresse. Puis, avec regret, elle activa les caissons. Les cloisons se refermèrent, emportant ses filles loin d'elle à jamais. Liara sentit sa gorge se nouer et des larmes rouler sur ses joues. Elle demeura immobile et attendit que la cryogénisation soit effective pour s'assurer que tout était en ordre.
- Fonction vitales stable. (Déclara IDA.)
- Prends soin d'elles, mon amie.
- Je vous le promet.
- Merci. Merci pour tout, IDA. (Elle renifla avec tristesse.) Adieu.
L'Asari se détourna puis quitta la grotte et en verrouilla l'accès. Et elle repartit dans le froid et la neige, seule.
Trois heures s'écoulèrent avant qu'elle ne parvienne au Normandy. Elle fit le tour de l'épave et se dirigea vers une zone à l'écart. Elle passa devant les tombes de ses amis, englouties sous la neige et s'arrêta devant une en particulier située en retrait. Elle déblaya maladroitement la neige sur la pierre, dévoilant ainsi l'inscription gravée : Mirlina Shepard. Commandant du SSV Normandy. Femme, amante, père.
- C'est fait, mon amour. (Déclara-t-elle d'une voix tremblante, frigorifiée.) Leur voyage a débuté. Et le mien se terminera bientôt. (Elle marqua une pause.) Je te rejoindrais bientôt.
Elle posa ses doigts sur ses lèvres, les embrassa, puis les fit glisser sur la pierre. Ensuite de
quoi, elle retourna dans le Normandy pour s'abriter.
La solitude pesa rapidement sur les épaules de l'Asari. Shepard et ses filles occupèrent ses pensées à chaque instant. Les premiers mois furent particulièrement difficiles. Ils laissèrent place aux années puis aux décennies. Liara se perdit dans ses souvenirs au travers des holos et des enregistrements. Et quand l'énergie vint à manquer, elle se contenta de sa mémoire. Et un soir, plus de deux siècles plus tard, elle s'endormit pour la dernière fois, en rêvant d'un cycle en paix où ses filles pourraient s'épanouir. Ses pensées se tournèrent ensuite vers Mirlina. Puis ses yeux se fermèrent. Ses muscles se détendirent. Et elle s'abandonna au sommeil.
Mirlina était là, face à elle, lui tendant la main, un sourire aux lèvres. Elle était rayonnante de beauté, dans une somptueuse tenue d'Amiral de l'Alliance. Sa jeunesse et son éclat frappèrent Liara et la rendirent heureuse. Elle prit la main de son amante et elles firent face à un homme d'âge avancé portant une tenue identique à celle de Shepard. Il s'agissait de l'Amiral Steven Hackett. Les amis du couple s'étaient tous réunit, vêtus de leurs plus beaux atours, tout sourire. Hackett commença à parler et Mirlina passa une bague au doigt de Liara. Celle-ci fit de même. L'Amiral joignit leur main et elles s'embrassèrent sous les applaudissements de leurs amis. Elles firent la fête, elles firent l'amour, elles firent leurs au revoirs. Puis, elles partirent. Liara ne put déterminer où et elle s'en fichait. Elles vécurent un bonheur complet. Aucune mort, aucune maladie, aucun monstre du passé ne vint les hanter. Elles eurent deux filles qu'elles aimèrent à la folie. Une vie s'écoula. Une vie d'amour. Une vie sans regret. Et quand Mirlina ferma les yeux pour la dernière fois, Liara s'allongea à ses cotés. Elle était bien évidemment triste, mais satisfaite de sa vie. Ses paupières étaient lourdes. Elle vit ses filles grandir et prendre leur envol en l'espace d'un battement de cil. Elles vécurent et tombèrent amoureuse. Elles fondèrent chacune une famille, eurent leurs propres filles et les regardèrent grandir. Et elles se réunirent régulièrement autour de Liara jusqu'aux ultimes moments. L'Asari était dans son lit, entourée de ceux qu'elle aimait. Et quand elle s'éteignit, on la pleura.
Liara se blottit un peu plus contre le corps encore chaud de Shepard. Une autre vie écoulée. Et elle ferma les yeux, s'abandonnant ainsi aux ténèbres en quête de son amour perdu.
Et dans les restes du Normandy SR2, le dernier être vivant dormait. Liara se mit sur le dos. Un sourire se dessina sur ses lèvres et elle entrouvrit la bouche.
- Mirlina... (Murmura-t-elle.)
Et elle cessa de bouger. Elle était en paix. Sa respiration ralentit pour finalement s'arrêter. Son coeur battit une ultime fois. Et la vie quitta son corps.
Maintenant...
La jeune femme prit sa première respiration depuis longtemps en gémissant. Un frisson secoua son corps comme elle reprenait conscience de ce qui l'entourait, comme la vie circulait à nouveau en elle. Elle plissa les yeux et aperçut une silhouette penchée au dessus d'elle, trop floue pour déterminer qui cela pouvait être.
- Maman ? (Marmonna-t-elle avec espoir, la bouche encore engourdie.)
Elle battit des paupières pour chasser son trouble. Sa vue se stabilisa après quelques minutes et ce qu'elle avait prit pour une silhouette n'était en fait qu'un tas de câble qui pendait misérablement. Elle grogna en se redressant, le corps encore douloureux.
- Maman ? Kayla ? (Appela-t-elle.)
- Non. Tu es la première réveillée, Itany.
- Oh, bonjour IDA. Merci.
Itany glissa maladroitement hors de son caisson et s'étala au sol en gémissant, les jambes totalement engourdies. Elle tenta de se relever, mais n'y parvint pas.
- Reste calme. Laisse le temps à ton corps de se réhabituer à ce qui l'entoure, à fournir un effort.
Itany acquiesça et inspira profondément pour se calmer. Elle entendit quelqu'un gémir un peu plus loin. Après quelques minutes, Kayla s'éveilla à son tour, dans les mêmes conditions que sa soeur. Itany attendit encore un peu puis se leva et aida son aînée.
- ça a marché ? (Demanda Kayla.)
- Oui.( Confirma IDA.) Vous avez dormit environ 47 000 années.
- Tant que ça ?
- Le signal n'a été découvert que récemment. Ils sont en routes.
Kayla opina puis secoua doucement la tête pour chasser le brouillard dans ses pensées. Elle regarda autour d'elle, prenant peu à peu conscience de son environnement. Ses yeux fouillèrent la pièce, à la recherche de quelque chose, ou quelqu'un.
- Où est Maman ? (Finit-elle par demander.)
- Je ne sais pas... (Répondit Itany, soudain troublée.)
Une lumière s'échappa du centre de la pièce et un hologramme de Liara s'activa depuis le terminal. Elle était jeune, souriante et sa beauté rappela aux deux soeurs l'époque précédant la mort de leur père, quand leur mère souriait encore.
- Si vous m'entendez... Tout n'est pas perdu. (Commença l'enregistrement.)
- IDA, où est Maman ? (Insista Kayla.)
Mais l'IA demeura silencieuse et l'hologramme poursuivit son discours. Puis, l'image se brouilla avant de se tordre. Liara apparut de nouveau. Mais la mélancolie se lisait dans ses yeux, le poids du chagrin se peignait dans ses traits et dans sa posture.
- Journal du docteur Liara T'Soni, à bord des restes du Normandy SR2. (Annonça l'Asari d'une voix fatiguée.) Ceci sera certainement ma dernière entrée et elle est pour vous, mes filles chéries, Kayla et Itany. Vous devrez être fortes. Il n'y a pas de manière de vous l'annoncer doucement. (Elle s'humecta les lèvres et reprit d'une voix enrouée.) A votre réveil, vous aurez certainement remarqué mon absence. Il est inutile de m'attendre. Je ne viendrais pas. Quand vous recevrez ce message, je serais morte depuis longtemps. Et il est important pour moi que vous en compreniez la raison.
Le visage des soeurs se décomposa et Itany mit une main devant sa bouche, en proie aux larmes.
- J'ai aimé votre père, d'un amour sincère, profond et sans faille depuis notre toute première rencontre. Et elle m'a aimé avec la même ardeur. Et depuis sa mort... Je suis malade. (Elle marqua une pause, submergée par l'émotion.) Je suis plongée dans la mélancolie. Et pour cette raison, j'ai décidé de ne pas me mettre en hibernation. Je souhaitais plus que tout demeurer dans ce vaisseau, aux cotés de votre père. Le Normandy était synonyme de sécurité, de bonheur... C'est dans ce vaisseau que j'ai eu une famille, que j'ai vécu mes plus grands moments de bonheur. C'est là que vous êtes nées. Je sais que c'est quelque chose de difficile à comprendre. Que vous vous sentirez abandonnez. Mais ce n'est pas le cas. Sachez que je vous aime. Et je vous confie les clés du futur. Bâtissez vous une vie de paix. Ne laissez pas les Moissonneurs vous en empêcher. Vivez mes filles. (Elle sourit.) Quoi que vous fassiez, votre père et moi seront fiers de vous. Soyez fortes. Car désormais, vous serez seules. Je vous aime.
Le terminal s'éteignit et les soeurs demeurèrent silencieuses un long moment. Des larmes roulèrent sur leurs joues et Itany tendit la main vers le terminal d'un air suppliant. Une série de bip résonna.
- Elle nous a abandonné... (Murmura Itany d'une voix brisée, en pleurs.)
Kayla la prit dans ses bras et la berça.
- Chut. ça va aller, chérie. Je suis là, d'accord ?
Itany dévisagea sa soeur, le visage dévasté par le chagrin.
- Elle nous a abandonné... (Répéta-t-elle, incrédule.)
- Non, Itany. Elle nous a préparé pour que nous puissions vivre, pour que nous ayons un futur. Elle n'a jamais cessé de penser à papa, de souffrir de sa mort.
Itany se blottit dans les bras de sa soeur et se laissa aller à son chagrin.
- J'aurais tant aimé qu'elle vienne avec nous...
- Moi aussi.
Les bips reprirent comme le terminal se réinitialisait. L'hologramme de Liara réapparut et reprit son message du début.
- IDA ? (S'enquit Kayla.)
Mais l'IA ne répondit pas.
- J'ai besoin de te parler.
Un compartiment à la base du terminal s'ouvrit, dévoilant un paquet, un cadre photo et un bloc de donnée.
- IDA ! (Cria Kayla.)
Une petite boule de lumière s'échappa d'un objet à droite du terminal et les soeurs reconnurent Glyphe.
- Je suis désolé, Mesdemoiselles, mais IDA ne répondra pas.
- Pourquoi ?
Le petit drone demeura silencieux.
- Glyphe, qu'est-ce que tu nous caches ?
- IDA s'est déconnectée.
- Un soucis d'énergie ?
- Non.
Itany se figea.
- Mais alors, ça veut dire...
- Elle s'est déconnectée. (Répéta le drone.)
Kayla déglutit.
- Elle ne reviendra pas, n'est-ce pas ?
- Non.
Le drone retourna vers son support et un arc électrique s'échappa de son corps. Une voix s'éleva dans la pièce et les soeurs reconnurent leur mère.
"- J'espère qu'elles comprendront. (Elle marqua une pause avant de reprendre d'une voix fatiguée.) Je me sens fatiguée... A bout de forces. Je ne devrais pas... Pas maintenant... Pas aussi vite...
- Vous ne vous en êtes jamais remise. (Affirma IDA.) C'est pareil pour moi."
Les voix moururent puis reprirent.
"- Tu es sûre de vouloir le faire ?
- Oui. Je veillerais sur leur sommeil et je les réveillerais."
Kayla ferma les yeux et secoua doucement la tête dans une tentative pour chasser son chagrin. Elle tourna lentement son regard vers sa soeur et la dévisagea intensément.
- Car désormais, vous serez seules. (Récita-t-elle d'une voix monocorde.)